
À Harare et Bulawayo des manifestations contre une prolongation du mandat du Président Emmerson Mnangagwa ont été réprimées par la police.
Malgré les avertissements stricts des autorités, de petits groupes de manifestants ont bravé la répression hier, 31 mars 2025, à Harare et Bulawayo, exigeant le départ du Président Emmerson Mnangagwa. Cette mobilisation, bien que limitée, reflète une contestation grandissante du pouvoir en place.
Une contestation inédite contre le chef de l’État
Le Président Mnangagwa, 82 ans, est confronté à une fronde politique et populaire d’une ampleur inédite depuis son arrivée au pouvoir en 2017, à la faveur d’un coup d’État contre Robert Mugabe. Surnommé « le crocodile » pour sa ruse politique, il est aujourd’hui critiqué pour la crise économique qui frappe le pays et pour ses supposées manœuvres visant à prolonger son mandat au-delà de 2028.
L’appel à manifester a été lancé par Blessed Geza, vétéran de la guerre d’indépendance et ancien cadre de la ZANU-PF, récemment exclu du parti au pouvoir. Réfugié dans la clandestinité, il accuse le gouvernement de préparer des attaques pour discréditer l’opposition. « J’annule la manifestation pour le moment, mais je reviendrai mercredi avec un message crucial », a-t-il déclaré sur les réseaux sociaux.
Une répression immédiate et une capitale paralysée
À Harare, la police a dispersé les manifestants réunis sur la place Robert Mugabe. Elle a utilisé des gaz lacrymogènes. « C’était annoncé comme une marche pacifique, mais la police commence déjà à frapper les gens », a confié une manifestante à CITE (Centre for Innovation and Technology). À proximité, des jeunes ont scandé « Nous ne voulons pas de 2030 » avant d’être dispersés par les forces de l’ordre.
La tension était également palpable à Bulawayo, où la plupart des commerces et services étaient fermés par crainte d’incidents. Des patrouilles policières sillonnaient la ville, tandis que les rues restaient largement désertées.
Une fracture au sein du pouvoir ?
Au-delà de la rue, la contestation gagne les rangs du pouvoir. Mnangagwa a récemment limogé le chef de l’armée, Anselem Nhamo Sanyatwe, le reléguant au poste de ministre des Sports, une décision perçue comme une tentative d’éviter une mutinerie militaire. Blessed Geza et sa faction de vétérans militent pour que le Président soit remplacé par son Vice-président, Constantino Chiwenga, ancien général ayant orchestré le renversement de Mugabe en 2017. Ce bras de fer pourrait marquer un tournant majeur dans l’avenir politique du Zimbabwe.
Si la mobilisation de lundi n’a pas rassemblé les foules, elle traduit un climat de défiance grandissant à l’égard du Président. « Un soulèvement de masse est peu probable, mais il est clair que les tensions au sein de la ZANU-PF sont vives« , analyse Pedzisai Ruhanya, directeur du Zimbabwe Democracy Institute. Face à une économie en crise et une répression accrue, les prochains jours pourraient être décisifs pour l’opposition comme pour le régime de Mnangagwa.