Tandis que les médias officiels préparent la population à un probable second tour, les forces de l’ordre se tiennent prêtes à empêcher toute violence à l’annonce des résultats de l’élection présidentielle. Des résultats que la commission électorale tarde à révéler, cinq jours après le scrutin. Le Mouvement pour le changement démocratique (MDC, opposition) ne l’a pas attendue pour revendiquer sa victoire.
Tous les regards sont tournés vers la commission électorale, au Zimbabwe, qui tarde toujours à annoncer les résultats de l’élection présidentielle, cinq jours après le scrutin. L’opposition, elle, ne pouvait plus attendre, ni se contenter de sa conquête de la chambre basse du parlement : le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) a remporté 99 sièges de députés (109 si l’on compte une faction dissidente du MDC), contre 97 pour l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF, parti au pouvoir), selon les derniers résultats des élections législatives organisées le même jour que la présidentielle. Ainsi, l’opposition a revendiqué dès mercredi sa victoire finale à la présidentielle, en s’appuyant sur son propre décompte : 50,3% des voix pour Morgan Tsvangirai, le candidat du MDC, contre 43,8% pour Robert Mugabe.
Si la commission électorale venait à confirmer ces chiffres, un second tour, prévu dans trois semaines, serait nécessaire, faute d’avoir atteint le seuil de 51% des voix prévu par la loi électorale pour être élu au premier tour. Tendai Biti, le secrétaire général du MDC, a déclaré que Morgan Tsvangirai était prêt à disputer cette deuxième manche. « Nous sommes prêts pour la victoire qui va en résulter », a de son côté avancé le porte-parole du gouvernement Bright Matonga, sans omettre de condamner les revendications de l’opposition : « Il faut qu’ils fassent très attention avec leurs activités. Ils pensent qu’ils peuvent provoquer la Zanu-PF, l’armée et la police. » Celles-ci « soutiennent fermement notre président », a-t-il ajouté.
Première apparition publique de Mugabe
De fait, les forces de l’ordre veillent. A Harare, la capitale, et Bulawayo, deuxième ville du pays, la police a établi des barrages routiers et interdit la vente d’alcool depuis mardi soir. Les observateurs craignent un déferlement de violence entre les deux camps à l’annonce des résultats, selon un scénario similaire à celui du mois de décembre au Kenya, où des violences avaient fait 1500 morts après une élection contestée. L’opposition formule aussi des craintes d’un autre ordre : « Le gouvernement a déployé la police et les services secrets dans les bidonvilles. Beaucoup pensent qu’il pourrait s’agir d’une manœuvre visant à intimider les gens pendant que le régime essaie de trafiquer les chiffres », a prévenu Tendai Biti.
Quant à Robert Mugabe, il a fait jeudi sa première apparition publique depuis samedi, à l’occasion d’une rencontre avec des observateurs de l’Union africaine (UA). Le chef de l’Etat, 84 ans, n’a fait aucun commentaire, mais le président sierra-léonais Ahmad Tejan Kabbah, qui dirigeait la mission d’observation de l’UA, a confié à la télévision que Mugabe « semblait très détendu » et estimait « que les problèmes auxquels est confronté le pays seront résolus à l’amiable ». Mais avec l’annonce par les médias officiels et la Zanu-PF d’un probable second tour, les rumeurs qui faisaient état, mardi, de négociations secrètes entre le gouvernement et l’opposition pour un passage « en douceur » du pouvoir, n’ont plus l’air d’actualité.