La mort du lion Cecil tué par un dentiste américain a fait le tour du monde et provoqué une vague d’émotion sur toute la planète. Mais de nombreux Zimbabwéens ont dénoncé la surmédiatisation du meurtre du célèbre félin du parc national d’Hwange au Zimbabwe.
Les médias du monde entier en ont-ils trop fait avec la mort du lion Cécil ? Pour de nombreux Zimbabwéens, la réponse est oui ! Ils déplorent que le meurtre par un dentiste américain du célèbre félin du parc national d’Hwange au Zimbabwe ait été si médiatisé alors qu’il y a des problèmes beaucoup plus graves au Zimbabwe, comme les pénuries d’eau, les coupures fréquentes de courant… Sans compter que 72% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, la restriction des libertés… « Oui, c’est cruel. Mais je ne comprends pas toute cette histoire. Il y a tellement de problèmes plus pressants au Zimbabwe, nous connaissons des pénuries d’eau, nous n’avons pas d’électricité, pas d’emploi… et les gens font tout ce bruit pour un lion ?», déplore Eunice Chunice, une habitante de la capitale Harare, qui s’est confiée au site New Zimbabwe.
Eric Knight, cité par un journal en ligne local, ne cache pas sa grogne. « Honnêtement, je suis choqué par toute l’attention portée à la mort du lion Cecil alors que mon pays a des problèmes bien plus graves et urgents », dénonçant en revanche le désintérêt international pour la crise économique et l’instabilité politique du pays. « Par contre, quand un lion est tué, là, le Zimbabwe fait la Une des journaux du monde entier. S’il vous plaît, un peu de respect. Depuis quand les lions sont-ils devenus plus importants que les êtres humains ? », renchérit le journaliste.
Selon le journal New Zimbabwe, en dehors des touristes, la plupart des personnes interviewées dans le centre-ville de la capitale zimbabwéenne, Harare, n’étaient même pas au courant de l’affaire concernant le félin à la crinière noire. Pour certains, la mort du lion Cecil est un problème pour les riches. Pour de nombreux internautes, le nom de l’animal les a poussé à s’attacher à lui, associant Cecil au colonisateur britannique et magnat des diamants Cecil John Rhodes, leur rappelant ainsi le temps où leur pays s’appelait Rhodésie du Sud, précise la BBC. « Curieux choix de nom, pour un lion du Zimbabwe : c’est comme si, en Erythrée, on avait appelé un lion du zoo d’Asmara Benito, en référence à l’ancien colonisateur italien Mussolini ».
« Si Cecil avait été un Africain, tué par un dentiste, il y aurait eu moins de gens pour partager cet article et moins de gens auraient exprimé leur indignation », rouspète cet éditorialiste du Telegraph, qui s’exprimait ainsi à travers l’article intitulé Arrêtez de parler du lion Cecil, s’il vous plaît. De même, « un défenseur de la démocratie, Itai Dzamara, a disparu depuis plus de quatre mois, mais ça, ça ne suscite pas le même engouement international », ironise le Zimbabwe Daily. Sans compter que chaque année, des Zimbabwéens sont victimes d’attaques de crocodiles, lions et autres animaux sauvages, dans l’indifférence générale. Pourtant, face à ce fléau, « les Américains ne réagissent jamais quand des villageois se font tuer par des lions et des éléphants ».
C’est aux Etats-Unis, en effet, que la mort du lion Cecil a particulièrement ému. Un portrait géant du félin a été projeté sur la façade de l’Empire State Building à New York. Alors même qu’un Afro-américain est tué toutes les 28 heures dans le pays…