La branche allemande du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) est vivement critiquée par certains Noirs des Etats-Unis et du Royaume-Uni. En cause, des publicités pour la scolarisation en Afrique qui présentent des enfants dont le visage blanc a été barbouillé de noir. Malgré les excuses de l’Unicef, qui reconnaît un manque de clarté dans sa communication, la contestation se poursuit sur Internet.
Un enfant souriant à pleines dents et un slogan : « En Afrique, beaucoup d’enfants seraient contents de s’inquiéter au sujet de l’école ». C’est l’une des quatre publicités qui vaut à la branche allemande du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) des critiques au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Et pour cause. Pour faire passer le message de l’initiative « Des écoles pour l’Afrique », l’agence Jung von Matt/Alster a choisi de barbouiller quatre enfants blancs de noir. Les publicités ont été diffusées lors du G8 des 7 et 8 juin et publiées gratuitement dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung, Spiegel, Stern et Die Zeit au cours de ce même mois. Objectif : rappeler aux huit plus grandes puissances du monde qu’elles n’honoraient pas leurs promesses pour assurer « l’éducation pour tous » d’ici 2015, conformément aux objectifs du millénaire.
Publicité à interprétation variable
« Nous n’avons reçu aucune réaction négative en Allemagne. La population a interprété les publicités comme elles le devaient. Le message de solidarité des enfants était « Nous avons peut-être tous l’air différent, mais nous sommes tous égaux. Nous voulons aller à l’école » », indique Rudi Tarneden, chargé des relations presse à l’Unicef Allemagne.
C’est peu dire. « Il a été intéressant de voir qu’aux Etats-Unis et au Royaume-Uni la perception a été différente, poursuit Rudi Tarneden. Nous avons reçu certaines lettres, majoritairement de la communauté noire, qui émettaient de fortes critiques. » Ces photos auront peut-être réveillé chez certains le souvenir de l’époque où l’on singeait les noirs en se badigeonnant le visage de cirage. « Je reconnais que ces publicités n’étaient peut-être pas très claires et nous comprenons qu’elles aient pu provoquer un malaise ».
« Réaction immédiate »
Pour le moins. Le blog Black women in Europe a publié un message plus que contestataire qui juge que les publicités « clament que chaque personne en Afrique est non instruite (…) d’une façon extrêmement condescendante ». Il poursuit, d’un ton acide : « Les déclarations des enfants ne tiennent pas compte des millions d’universitaires africains et des personnes diplômées et encore une fois réduit tout un continent à un village de gens couverts de boue, illettrés et non civilisés qui ont besoin d’être éduqués (probablement par un quelconque occidental). C’est vraiment une triste régression ».
Ce texte a suscité une réaction « immédiate » de l’Unicef, qui avait mis les publicités en ligne sur son site fin juin. « A la première plainte, vers le 15 juillet, je suis allé voir le webmaster et je lui ai demandé de les enlever. Elles ne seront plus jamais utilisées. Si elles ont offensé qui que ce soit, nous nous en excusons. Ce n’était bien sûr pas le but. J’ai appelé certaines personnes qui se sont plaintes et, après leur avoir expliqué les choses, elles ont un peu mieux compris les publicités », souligne Rudi Tarneden.
Cyber-campagne contre l’Unicef ?
Les publicités semblent cependant avoir plus d’impact que les excuses de l’Unicef. Les messages amers se suivent sur différents sites ou blogs. A l’image de celui-ci, publié le 26 août sur le blog My global hustle : « Cela me fait beaucoup de peine que l’Onu, sensé être le champion de l’égalité et de la justice, accepte ces publicités avec leur portrait ridicule et condescendant des enfants noirs africains ».
D’autres pointent du doigt que ce n’est pas la première fois que l’Unicef fait de telles publicités, en arguant qu’elle a déjà utilisé des adultes blancs noircis grossièrement par le passé . Ailleurs, on dénonce « la boue » utilisée pour peindre les petits Allemands en noir. Une « boue » qui se révèle en fait être, selon Rudi Tarneden, « du maquillage ». Il a d’ailleurs précisé sur Black women in Europe que ce maquillage n’avait pas l’intention de présenter les africains comme « des enfants sales ».
Reste que l’image de l’Unicef Allemagne a pris un mauvais coup. Une cyber-campagne de dénigrement aurait même commencé. « Des blogs des Etats-Unis et du Royaume-Uni essayent de présenter l’Unicef comme une organisation raciste. C’est exagéré et ce n’est pas vrai. La preuve est que nous avons réagi immédiatement », souligne Rudi Tarneden. D’aucuns diront que le mal est déjà fait.