Il y a un calme précaire ce mercredi 17 juillet à N’zérékoré, dans le sud-est de la Guinée, où des affrontements interethniques ont fait plus de quarante morts et plus d’une centaine de blessés. Selon un agent de la Croix Rouge basé sur place, certains corps n’ont pas encore été retrouvés.
(De notre correspondant à Conakry)
N’zérékoré renait petit à petit de ses cendres après de deux journées de violences. Le dernier bilan fait état d’une quarantaine de morts et des centaines de blessés. Des corps restent aussi introuvables, indique-t-on.
Des corps dans les maisons incendiées
« Je viens juste de l’hôpital, j’ai compté 44 morts à la morgue de l’hôpital central de N’zérékoré. Mais, tous les corps ne sont pas là. Certains corps se trouvent encore dans les quartiers, d’autres dans les maisons qui ont été incendiées. La Croix Rouge s’attèle à rechercher les corps dans les quartiers et dans les localités environnantes », a confié ce soir (18 heures GMT) un agent de la Croix Rouge qui a requis l’anonymat. Il a en outre souligné qu’un accord a été trouvée entre les autorités préfectorales et les sages de N’zérékoré pour l’inhumation des corps qui se trouvent à la morgue. « Vous savez il y a des corps en décomposition. La plupart des personnes ont été brulées vives », a-t-il dit. Et d’ajouter que les autorités ont décidé de creuser une fosse commune pour enterrer tous les corps.
Depuis ce mercredi matin, un calme précaire règne à N’zérékoré. « Les gens se promènent dans les quartiers, mais c’est à l’hôpital où il y a plus d’affluence. Les gens viennent voir s’ils vont reconnaitre un de leurs parents disparus depuis le début des événements », a fait savoir un autre citoyen de la localité.
Ces malheureux événements survenus à N’zérékoré ont été commentés diversement à Conakry par les acteurs politiques et les organisations des défenses des Droits de l’Homme. L’OGDH, (l’Organisation Guinéenne de Défense des Droits de l’Homme et du Citoyen) parle de « crimes extrêmement graves qui peuvent compromettre la paix et la quiétude sociales ». Cependant, elle condamne aussi avec énergie ces violations des Droits de l’Homme qui se répètent et demande que les crimes commis à Siguiri, à Saworo, Zogota et à l’occasion des marches et manifestations politiques soient jugés.
« La faute doit au gouvernement actuel »
Le Président du Mouvement Africain pour la Défense des Droits de l’Homme et de la Gouvernance (AFRIDHO), Nouha Traoré, quant à lui, a animé ce mercredi une conférence de presse au cours de laquelle, il a condamné ces violences. Selon lui, la faute doit être imputée au gouvernement actuel qui n’a pas fait de la réconciliation son cheval de bataille. « Pour nous, ces affrontements interethniques à N’zérékoré auraient pu être évités si le régime actuel avait pris à bras le corps la question de la réconciliation nationale. Depuis 2010, il a été annoncé qu’on va assister à la mise en œuvre d’un véritable programme de réconciliation nationale. Ça aurait servi de cadres pour poser tous les débats sur tous les évènements qui auraient entrainés des frustrations de part et d’autre. Si cette réconciliation avait eu lieu avant, ces évènements à N’zérékoré, les questions centrales qui se posent aujourd’hui entre différentes communautés, auraient trouvées des solutions et on n’en serait pas là. Donc, nous estimons qu’il y a eu une négligence très coupable du régime actuel dans la mesure où nous tentons de dérouler l’ensemble des plans liés à la réconciliation nationale », a-t-il dit.
Le Quai d’Orsay déconseille la région à ses ressortissants
Même son de cloche du côté de l’opposition. S’exprimant sur la question dans une radio privée de la place, le porte-parole de l’opposition Aboubacar Sylla a indiqué : « qu’au lieu que le gouvernement s’attaque aux vrais problèmes, il s’est contenté de mettre en place une commission provisoire de réflexion sur le processus de réconciliation », a-t-il dit. Avant de déplorer que commission n’a existé que sur papier.
Le ministre français des Affaires étrangères, a invité ses ressortissants résidant en Guinée à éviter la région de N’zérékoré à cause des conflits intercommunautaires. « Il est recommandé aux Français résidents ou de passage en Guinée, de s’abstenir de tout déplacement dans ce périmètre. Il est également recommandé aux personnes envisageant de se rendre en Guinée forestière de surseoir à leur déplacement dans cette région jusqu’au retour au calme, et de se tenir informé de l’évolution de la situation », indique le communiqué du Quai D’Orsay.