Vers le retour du 27e trésor royal béninois


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Le Président du Bénin, Patrice Talon
Le Président du Bénin, Patrice Talon

La restitution par la France au Bénin, le 10 novembre 2021, de 26 œuvres pillées à Agbomè (Abomey) lors de la conquête du royaume du Danxomè par l’armée française avait suscité un fort enthousiasme dans le pays de Patrice Talon. Mais on sait aujourd’hui que cette restitution n’était pas complète. Il manquait une 27e œuvre qui se trouvait dans un musée d’Helsinki, capitale de la Finlande. Cette œuvre, retrouvée grâce au travail collégial du journaliste Pierre Firtion, de la conservatrice finlandaise Pilvi Vainonen et de l’historienne de l’art bénino-française Marie-Cécile Zinsou, pourrait retrouver sa terre d’origine dans les plus brefs délais.

Trois ans après le retour de 26 trésors royaux du Danxomè pillés par le colonel Alfred Amédée Dodds, au moment de la conquête du royaume de Dada Gbèhanzin (Béhanzin) en novembre 1892, le Bénin est sur le point d’obtenir la restitution d’un 27e objet qui ne se trouvait plus en France, mais à Helsinki en Finlande. Il s’agit d’un tabouret tripode appelé kataklè et qui était utilisé dans le processus d’intronisation du souverain au Danxomè.

Une enquête inspirée par Marie-Cécile Zinsou, conduite par Pierre Firtion avec l’appui de Pilvi Vainonen

C’est par Marie-Cécile Zinsou, présidente de la Fondation Zinsou au Bénin, que l’enquête va commencer. Alors que le Bénin recevait en novembre 2021 les 26 objets, l’historienne d’art s’interrogeait sur ce nombre : pourquoi 26 et non pas 27, puisque les documents auxquels elle avait accédé mentionnaient bien 27 objets. « Au départ, je ne comprenais pas pourquoi Emmanuel Macron parlait de rendre vingt-six œuvres, car je savais que vingt-sept pièces avaient été rapportées en France par Dodds », confie Marie-Cécile Zinsou. Mais, face à l’effervescence suscitée au pays par le retour de ces objets, l’historienne d’art avait gardé par-devers elle sa préoccupation pour « ne pas gâcher la fête », comme elle l’a elle-même. Elle a cependant évoqué cette question avec le journaliste de RFI, Pierre Firtion, qui était à Cotonou dans le cadre de la couverture de la restitution des 26 objets.

Le journaliste commença alors ses investigations et finit par découvrir le fameux 27e objet. Un kataklè échangé dans une série d’objets avec un musée finlandais par le musée de l’Homme en 1939. Ce genre d’échange entre musées était courant à l’époque. Cela n’avait donc rien d’extraordinaire. Entre des prises de contacts, discussions, fouilles d’archives, recherches en ligne et voyages, l’enquête menée avec l’appui de Pilvi Vainonen par Pierre Firtion aura duré plus de deux ans. Mais, au bout du compte, l’objet a été bien retrouvé au musée national de Finlande, à Helsinki.

La Finlande disposée à retourner l’objet à son pays d’origine

Pour les Finlandais, le kataklè a sa place dans son pays d’origine, le Bénin. Là-dessus, la position de la directrice du musée national de Finlande ne souffre d’aucune ambiguïté. « Le fait est que ce kataklè existe. Et je pense qu’il devrait être rendue à sa communauté d’origine », a-t-elle confié à Pierre Firtion. À la question du journaliste de savoir si la directrice serait prête à restituer l’objet aux autorités béninoises si elle l’avait, sa réponse est claire : « Nous commencerions à organiser les choses, bien sûr. Il faudrait être en contact avec le Bénin et agir ensemble ». Voilà qui est dit.

Du côté béninois, on n’entend plus perdre une seconde. Une délégation conduite par le ministre béninois de la Culture, Jean-Michel Abimbola, devrait se rendre à Helsinki, ce mardi 5 novembre, pour discuter avec son homologue finlandais des conditions de retour de cet objet, témoin de l’histoire du Bénin. Le chemin semble désormais ouvert pour le retour du kataklè, d’autant plus que l’objet, autrefois propriété de la France, a été radié des collections nationales françaises en août 2024. Une décision surprisequi a sans doute été facilitée par Marie-Cécile Zinsou dont Pierre Firtion a relevé l’intense lobbying auprès de plusieurs responsables français pour faire avancer le dossier.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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