Paris a livré l’année dernière de nombreuses armes au Tchad. Pour 13 millions d’euros. Plusieurs organisations non gouvernementales accusent la France de ne pas avoir respecté l’engagement qu’elle avait pris, de ne plus armer les pays qui violent les droits de l’Homme. Elles demandent une enquête parlementaire.
Le Tchad figure en bonne place des clients de la France, en matière d’armements. Rendu public lundi, le rapport du ministère français de la Défense sur les exportations d’armement en 2008 indique que les ventes d’armes de la France au Tchad ont progressé de 50% l’année dernière, pour atteindre près de 13 millions d’euros. Un pactole qui dépasse l’aide apportée par la France à Ndjamena la même année pour renforcer le système éducatif, lutter contre la mortalité infantile et le Sida.
Mais la France avait-elle le droit de livrer des armes au gouvernement tchadien ? Non, estime une coalition d’Ong dont Amnesty International France, Oxfam France – Agir ici, le Secours catholique, Caritas France et le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD). Selon ces organisations regroupées dans une plate-forme baptisée « Contrôlez les armes », les 27 pays membres de l’Union européenne ont adopté en décembre dernier un « Code de conduite de l’Union européenne en matière d’exportation d’armements « , à travers lequel ils se sont engagés à ne plus vendre d’armes dont l’usage pourrait participer à de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire, ou porter atteinte au développement économique.
« Organiser un grand débat parlementaire »
Or constatent les Ong, « une commission d’enquête internationale, soutenue par la France, a conclu aux responsabilités principales et directes des autorités tchadiennes dans de graves violations des droits de l’Homme et du droit international humanitaire qui ont eu lieu au cours de la bataille de Ndjamena, en février 2008 ». L’appui militaire de Paris avait permis au président Idriss Deby Itno de sauver son pouvoir menacé par une rébellion armée venue du Soudan voisin.
Par conséquent, « les députés doivent se réveiller et interroger le gouvernement sur la légalité des exportations de la France vers des pays comme la Chine, la Colombie, Israël ou le Tchad », exhorte Nicolas Eucken, d’Oxfam France. Selon ce responsable, les élus français doivent aussi organiser un grand débat parlementaire, « pour demander au gouvernement ce qu’il compte faire pour mettre la législation française en conformité avec ses engagements européens ».