Chez les peuples Bassa du Cameroun, les corps sont souvent exhumés par des inconnus pour des besoins obscurs. Les familles sont donc obligées de veiller parfois pendant neuf jours sur la tombe. Même les techniques spéciales d’inhumation désormais appliquées seraient loin de dissuader les voleurs de cadavres.
Toutes les précautions prises ce samedi à Log-sagal, un village de la région Bassa du Cameroun pendant l’inhumation du journaliste Paulin Hilela seraient loin d’éloigner de potentiels exhumeurs de sa tombe. « Nous allons veiller pendant environ neuf jours toutes les nuits sur sa tombe pour dissuader ceux qui seraient tenté d’emporter son corps », précise un des cousins du décédé. Il promet de se faire assister pour la cause par une dizaine des membres de sa famille. Ceux-ci vont, à l’en croire se relayer, armés de gourdins, de machettes et d’un fusil de chasse autour de sa sépulture qui jouxte la maison familiale.
« Il le faut, car malgré toutes les précautions prises, les voleurs de corps réussissent toujours à emporter des restes dans notre région. Des plaintes pour corps ainsi disparus après inhumation sont légions. Il n’est pas rare de trouver des sépultures ouvertes ou des corps mutilés dans la brousse », confirme un adjudant chef de gendarmerie, lui aussi cousin de Paulin et qui assistait à son inhumation.
En effet, chez les peuples Bassa du Cameroun qui se recrutent dans les régions du centre et du Littoral du pays, les personnes inhumées sont parfois exhumés et emportés par des inconnus. A en croire plusieurs ressortissants de cette région, les exhumeurs prélèvent sur les cadavres des parties ou de l’eau nécessaire pour la fabrication des poisons et fétiches de toutes sortes. « Je ne l’ai jamais vu, mais il se raconte aussi que ces voleurs de corps conservent certains corps exhumés en lieu sûr, les laissent se décomposer et récupèrent les ossements qu’ils écoulent à travers des réseaux organisés », explique l’adjudant chef cité plus haut. Les médias relaient régulièrement des cas de personnes interpellés en possession d’ossements humains. Il demeure néanmoins difficile de lier la provenance de ces ossements à cette pratique.
Techniques d’inhumation spéciale.
Les peuples Bassas ont depuis lors imaginés une technique spéciale d’inhumation pour dissuader d’éventuels exhumeurs. Le caveau où reposera désormais le mort creusé à deux mètres sous terre compte une chambre et une antichambre. La première longue et large d’un demi-mètre précède l’antichambre d’un mètre et demi. A Log-sagal, le cercueil dans lequel reposait le journaliste ne rentrera dans la terre qu’en pièces détachées. Le corps y a été extrait et introduit dans la fosse, précisément dans la partie considérée comme chambre. 20 kilogrammes de sel ont été ensuite déversés sur la dépouille pour accélérer sa décomposition.
Des piquets bien taillés ont été disposés pour constituer des supports à une certaine dalle. Un morceau de tôle et du bois obtenu après destruction du cercueil renforcent l’infrastructure. Du béton préparé à l’avance y est ensuite déversé jusqu’à couverture totale de la chambre. « Avec ces précautions, les exhumeurs qui s’y aventureraient auraient beaucoup de mal à atteindre le corps et l’emporter. Bien plus, il se sera suffisamment décomposé au bout de neuf jours grâce à l’effet du sel » explique l’adjudant chef.
Finie cette première étape, la terre sortie de la fosse est utilisée pour remplir la partie longue d’un mètre et demi qui constitue au final l’antichambre. Cette autre partie sera plus tard recouverte d’une autre dalle sur laquelle sera posée l’épitaphe. Ce qui n’empêche pas des membres de cette famille de veiller sur la tombe pendant les neuf premiers jours afin d’éviter tout désagrément.