Après 18 mois d’âpres négociations, le Niger et le géant français du nucléaire Areva ont annoncé, lundi, avoir signé un accord pour l’exploitation de deux mines d’uranium.
Il aura fallu 18 mois d’âpres négociations pour que le Niger et le géant français du nucléaire Areva réussissent à s’entendre. Ils ont en effet annoncé, lundi, avoir signé un accord pour l’exploitation de deux mines d’uranium, signant la fin d’un bras de fer dans un secteur stratégique pour Paris et Niamey. Les deux parties, dans un communiqué conjoint, ont insisté sur la nature « équilibrée » de cet accord, dont elles discutaient depuis janvier 2013. « Nous avons entendu les attentes légitimes du gouvernement du Niger d’augmenter les recettes venant des activités de l’uranium », a affirmé Luc Oursel, le président du directoire d’Areva, lors d’une conférence de presse à Niamey.
Comment se caractérise cet nouvel accord entre les deux parties ?
Areva a accepté qu’une loi minière datant de 2006 soit appliquée à la Somaïr et la Cominak, les sociétés exploitant les mines du nord du Niger que le groupe français contrôle partiellement. L’application de cette loi, qui constituait le principal point de désaccord entre les deux parties, fera croître la redevance minière de 5,5 à 12%. Somaïr et Cominak seront à l’inverse soumises à un « mécanisme de neutralité de la TVA », selon le communiqué, ce qui signifie selon une source proche du dossier qu’elles en seront au final exemptées, rapporte l’AFP.
Omar Hamidou Tchiana, le ministre nigérien des Mines, a tenté de justifier cette mesure, en rappelant que « la production d’uranium n’est pas consommée au Niger. Il est normal qu’elle ne subisse pas la TVA », a justifié M. Tchiana, ajoutant que les achats au Niger des deux sociétés seront à l’inverse assujettis à cette taxe. Une mesure pointée du doigt par l’ONG Oxfam, soulignant qu’elle coûtera « 10 à 15 millions d’euros par an au Niger », dénonçant l’opacité et l’absence de « contrôle démocratique de ces négociations ».
Le chiffre d’affaire d’Areva quatre fois supérieur au budget de l’Etat
Malgré le scepticisme de l’ONG Oxfam face à cet accord, l’enjeu était de taille pour Areva, le Niger comme pour la France actionnaire à 80% d’Areva et où 75% de l’électricité produite est d’origine nucléaire. Il s’agissait pour le géant du nucléaire français de maintenir au meilleur coût possible sa présence au Niger, le deuxième pays – derrière le Kazakhstan et devant le Canada – pour le groupe, en terme de production. Areva extrait en effet environ un tiers de son uranium de la région d’Arlit (nord), où le risque terroriste est élevé. Cinq Français et un Togolais y avaient été enlevés en 2010. Deux d’entre eux avaient été libérés en 2011, et les quatre autres fin 2013.
De son côté, pour le Niger, le contrôle des ressources naturelles était en jeu. D’autant qu’en tant que quatrième producteur d’uranium mondial, il est aussi l’un de pays les plus pauvres du monde. Un constat que l’ONG Oxfam avait dénoncé, pointant du doigt les bénéfices d’Areva dans le marché de l’uranium face un Niger qui en profite très peu. Le Président nigérien Mahamadou Issoufou avait aussi, de son côté, estimé en décembre dernier qu’il était temps que les choses évoluent : « Peut être que le rapport de force est en train d’évoluer, le monde a changé. C’est un jeu d’égal à égal ».
Selon la société civile nigérienne, l’uranium représentait plus de 70% des exportations du pays en 2010, mais à peine 5,8% de son PIB, dénonçant « quarante ans de pillage des sous-sols nigériens ». Sans compter que Le chiffre d’affaires d’Areva en 2012 est quatre fois et demi supérieur au budget de l’Etat nigérien – 9 milliards d’euros contre 2.