Fonctionnaires et citoyens ordinaires du Burundi seront astreints, dès janvier, à alimenter une tontine de solidarité pour aider les habitants de 3 provinces frappées par la sécheresse. La mesure risque d’alourdir un peu plus le budget domestique d’une des populations les plus pauvres au monde.
Valentine Lescot
La disette menace les populations du nord-est du Burundi. Afin de leur venir en aide, le gouvernement de Bujumbura a décidé de créer une “ contribution à la solidarité nationale ”, prélevée sur les salaires pendant les 4 prochains mois. Les ministres et les parlementaires payeront l’équivalent de 8% de leur rémunération et les salariés du public et du privé, dont les revenus mensuels sont supérieurs à 100 000 Fbu (francs burundais, 73 euros), 2%. Les non salariés, les petits paysans et les artisans devront verser mensuellement à la Caisse de solidarité nationale 100 Fbu (0,07euros).
La somme récoltée devrait ainsi permettre de nourrir environ 1 million de personnes. Selon la ministre chargée de la Réhabilitation et de la réintégration des personnes déplacées et des réfugiés, Françoise Ngendahayo, 50 millions de dollars sont nécessaires pour subvenir aux sinistrés. La mesure, rendue publique à l’issue du conseil des ministres mercredi, intervient après que le gouvernement ait déclaré vendredi dernier les régions de Kirundo, Ngozi et Muuyinga “ zone sinistrée” pour cause de sécheresse. Une centaine de personnes seraient déjà mortes de faim. Des centaines de milliers d’autres sont menacées.
La Centrale des syndicats contre un impôt supplémentaire
La Confédération des syndicats du Burundi (COSYBU), qui se revendique comme étant un organisme indépendant de tout parti politique et du pouvoir, s’est opposée à cette taxe de solidarité. “ Les salaires burundais, lesquels ont connu une dévaluation de 523 % en à peu près 10 ans, sont insuffisants. Au moment où le gouvernement prenait cette mesure, nous étions déjà en train de revendiquer une exonération de la taxe professionnelle sur les salaires inférieurs à 80 000 Fbu (58 euros) ”, explique le Président de la Cosybu, Pierre Claver Hajayandi. Celui-ci se dit en accord avec l’élan de solidarité nationale contre la famine mais préfèrerait que les Burundais restent libres de choisir le montant de leur contribution.
Il plaide également pour une gestion transparente des fonds récoltés, craignant un détournement. La Confédération a pris l’initiative d’organiser une collecte indépendante.“ La semaine dernière, avant que le gouvernement n’ait proposé la taxe, nous avons ouvert un compte bancaire à la Banque Commerciale du Burundi sur lequel chaque citoyen peut déposer une somme[[<*>N° du compte sur lequel vous pouvez vous aussi faire un virement : 301 00 110 14-04-64]. Nous avons déjà récolté 3,5 millions de Fbu (2 560 euros) et reçu de la part de la société Toyota une tonne de riz et une tonne de haricots secs ”, ajoute le Président. De 1993 à 2000, le gouvernement avait lancé une souscription nationale à l’effort de guerre. Selon la Cosybu, les fonds, qui n’ont jamais fait l’objet de comptes rendus, auraient été détournés.
En plus de la population burundaise, le ministre des Affaires étrangères, Térence Sinunguruza, s’est tourné vers les Organisation non gouvernementales et les bailleurs internationaux pour demander de l’aide. Le Burundi sort d’une guerre civile qui a débuté en 1993. Ruiné, ce pays fait parti des plus pauvres au monde. Le Programme alimentaire mondial y distribue déjà des rations alimentaires. En 2004, l’organisme avait envoyé entre 70 000 et 85 000 tonnes d’aide alimentaire à 1,5 million de personnes. Le Programme des nations unis pour le développement a d’ores et déjà réuni 3 millions de Fbu (2 200 euros). L’Union Africaine a, pour sa part, remis 2 000 dollars à la province de Kirundo. L’Eglise du Bon Berger à Bujumbura a contribué d’une somme équivalente. Gageons seulement que toutes ces sommes soient utilisées à bon escient.