Il y a quelque chose d’à la fois très naturel et un peu pathétique pourtant dans la manière dont les décideurs, les sages et les militants de toutes sortes s’emparent actuellement du phénomène de mondialisation et essaient de le réduire en équations simples.
Le monde est en train de changer de forme : les distances raccourcissent, les temps de voyage et de communication s’écrasent, nous sommes tous voisins, tous embarqués sur la même flotte, et les mouvements incohérents des états sont aussi absurdes qu’au sein d’une escadre la prise d’indépendance inopinée d’une frégate.
Mais dans cet ordre nécessaire qui s’instaure entre les nations, les pauvres restent pauvres, les riches restent riches, les puissants demeurent les maîtres du jeu économique, les faibles en demeurent les jouets. Au-delà du symbole, nécessaire, la tenue des sommets symétriques de Davos et de Porto Alegre témoignent d’un réel besoin de concertation et de réflexion partagée, à un échelon planétaire, sur les enjeux de cette mondialisation et sur les moyens à mettre en oeuvre pour qu’elle soit juste et équitable.
Car de tous les phénomènes humains, celui-là est le moins maîtrisable, touchant à la fois des réflexes psychologiques profonds (les conflits d’identités, les rivalités historiques) et des réalités matérielles concrètes (la misère qui frappe les deux-tiers de cette humanité qui postule sa propre unité, l’exclusion, la violence, les risques de désorganisation sociale que fait craindre le terrorisme).
Avec pourtant une certitude : ce sera toujours par le dialogue, la connaissance et le respect mutuel que l’humanité s’enrichira. Le métissage seul est véritablement fécond, mais dans le respect des diversités et des cultures respectives qu’il allie. Et une conviction tenace : l’essor de la création et de l’expression de l’Afrique et du Maghreb peut offrir à ce monde, qui a perdu ses vieux repères, une infusion d’humanité. Pour que chacun puisse entrer dans cet avenir global avec l’assurance de celui qui a accompli son retour aux sources, et qui sait où est l’essentiel. Là où l’on agit pour autrui -non pour soi-même !