Alors que j’étais tranquillement assis dans ma voiture, en train de consulter mon mailing, je lève la tête et tombe sur un monsieur, debout devant un taxi, les narines qui coulent. N’ayant sans doute pas de mouchoir par devers lui, l’homme essuie sa morve avec la main droite, avant d’écraser le tout dans ses deux mains et essuyer le reste sur ses habits. Ce n’est pas tout.
Je me tenais à environ trois mètres d’un groupe d’individus qui discutaient tranquillement. Je lève la tête et voit l’un d’eux qui se retourne. Pas de moustache, ni de barbe, aucune tâche sur le visage, à part deux ruisselets de morve qui coulent de ses narines. D’une dextérité sans pareil, l’homme lève la main droite, ramasse tout ce qu’il y avait de liquide sortant de ses narines, joint ses deux mains et exerce une pression avec de légers glissements pour ne pas trop attirer l’attention. Juste trois secondes et le voilà frotter ses deux mains sur ses habits. Il pouvait alors poursuivre sa conversation.
Nous sommes bien au Sénégal où le variant Omicron continue de sévir, même s’il n’est pas très létal. Dans tous les cas, l’homme, dont les narines peuvent couler à ce point, même s’il n’est pas atteint de Coronavirus, n’est pas en bonne santé. Tout au plus il souffre de rhume pour ne pas dire de grippe dont la contagiosité n’est plus à démontrer. En tout cas, sur ses mains venaient d’être déposés des germes et autres virus. Alors qu’il poursuivait tranquillement sa conversation, il est d’abord interrompu par un conducteur de moto, casque bien vissé sur la tête. Ce dernier lui réclame une poignée de main qu’il obtient volontiers.
Deux secondes de contact, le motocycliste poursuit le même exercice avec les autres personnes qui échangeaient avec l’homme enrhumé. Un contact, deux, puis trois. Il n’a pas fini, car il va poursuivre ses salamalecs et donner la main à un collègue, un vendeur de masques en détail. Ce dernier était arrivé sur leur de travail un peu plus tôt. Et a donc eu le temps d’exposer sa marchandise et même de vendre quelques masques, à 100 FCFA pièce. Avant qu’il n’enlève son casque pour se préparer à mettre en place son étal, un autre visiteur s’amène du côté de l’homme enrhumé.
Un taximan, qui voulait de la monnaie d’un billet de 5 000 FCFA, remis par un client qui attendait tranquillement dans la voiture, le retour du chauffeur. Malheur à ce dernier, c’est l’homme aux morves qui va lui faire la monnaie. Tous deux auront pris le soin d’échanger quelques politesses, l’un à moins de 50 centimètres de l’autre, avec tout ce qui a pu circuler comme postillons entre eux deux. Quant au client qui recevra sa monnaie du billet de 5 000 FCFA remis au taximan, il ne se doute même pas qu’il venait d’entrer indirectement en contact avec un virus ou une bactérie. En espérant qu’il avait par devers lui un gel hydro-alcoolique pouvant lui permettre de freiner la chaîne de propagation.
Depuis ma voiture, je me suis senti coupable du délit de non-assistance à personne en danger. Car devant moi, sous mes yeux, se déroulait une scène de contamination en direct. Suis-je obligé de lancer l’alerte et m’attirer les foudres de personnes qui ignorent certaines règles d’hygiène ? Je tente le coup avec le vendeur de masques avec qui j’échange souvent quelques civilités. Il venait de réaliser ce qui se passait sous ses yeux, et ce dans quoi il venait d’être embarqué… une nouvelle fois. Car, selon son propos, c’est un fait récurrent. L’habitude de serrer systématiquement la main, sans savoir ce que l’on récolte en retour. Ne sachant point ce que l’autre a fait de ses mains, avant de venir nous les présenter pour des salutations. « Je comprends maintenant d’où me vient ce rhume que je traîne depuis 4 mois », me confie l’homme; qui est vendeur de masque. Au détail.
A lire : Covid-19 : le business du matériel de protection au Sénégal (vidéo)