Un témoin clé ivoirien a affirmé à la chaîne de télévision France 3 que le journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer a été assassiné. Le témoignage de Berthe Seydou, jugé « crédible » par la justice française, qui l’a entendu plusieurs fois, confirme l’implication du camp présidentiel ivoirien dans cette affaire.
Nouveaux rebondissements dans l’affaire Kieffer. Berte Seydou a accordé une interview à la chaîne France 3, où il explique ce qui est arrivé le 16 avril 2004 à Guy-André Kieffer. Cet Ivoirien se présente comme le chauffeur du chef présumé du commando qui a enlevé le journaliste franco-canadien : le capitaine Jean-Tony Oulaï, mis en examen le 13 janvier 2006 en France, où il espérait trouver refuge, pour « enlèvement et séquestration » dans le cadre de cette affaire.
Guy-André Kieffer a été enlevé sur le parking d’un centre commercial d’Abidjan alors qu’il avait rendez-vous avec Michel Legré, beau-frère de la première dame Simone Gbagbo. Selon Berte Seydou, il a été kidnappé par le commando, conduit en 4×4 dans une villa, puis transféré à la présidence, où il est resté deux jours et deux nuits.
« Mitraillé » dans la « ferme aux volailles »
Le journaliste, qui enquêtait sur des détournements de fonds dans la filière cacao, dont la Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial, a ensuite été emmené à la « ferme aux volailles ». Berte Seydou affirme que c’est dans ce « lieu caché des exécutions » que Guy-André Kieffer a été « mitraillé » sur ordre de Jean-Tony Oulaï. Enterré sur place, le corps a deux jours plus tard été exhumé et transporté dans une autre villa. Il a pour finir été emmené dans un endroit inconnu de ce celui qui se présente comme le témoin clé des dernières heures de Guy-André Kieffer.
La justice française a plusieurs fois entendu Berte Seydou. Elle a vérifié ses déclarations, très précises, et les qualifie de « crédibles ». Un sentiment partagé par Bernard Kieffer. Le frère du disparu estime que « c’est une piste intéressante mais [que] ce n’est pas la vérité établie ». Et de souligner que les allégations demandent « à être prouvées judiciairement ».
L’affaire Kieffer, une « priorité » pour la France
Le chef de l’Etat français, Nicolas Sarkozy, a réaffirmé à la famille du disparu, qu’il a reçue jeudi, que ce dossier était une « priorité » et qu’il allait s’entretenir avec son homologue ivoirien à ce sujet. « Nous avons sollicité à plusieurs reprises une rencontre avec Jacques Chirac, et on n’a jamais vu de suite, a expliqué Osange Silou-Kieffer, la veuve du journaliste, à sa sortie de l’Elysée. Il y a manifestement un changement, c’est évident pour nous.»
Convaincue de l’implication du camp présidentiel ivoirien, elle s’est insurgée : « Si les gens qui sont les donneurs d’ordre de l’enlèvement de mon époux n’étaient pas des proches de Gbagbo, je pense que c’est un dossier que les juges auraient réussi à boucler ». Le principal suspect de cette affaire, Michel Legré, est inculpé en France pour « enlèvement et séquestration » et en Côte d’Ivoire pour « enlèvement, séquestration et assassinat ». Emprisonné, en mai 2004 en Côte d’Ivoire, il a été remis en liberté provisoire en 2005. Quant à Jean-Tony Oulaï, après sa détention en France, il a été remis en liberté sous contrôle judiciaire.