Guy Hascoët, secrétaire d’Etat français à l’économie solidaire veut s’impliquer en Afrique. Morceaux choisis, entre projets, discours de la méthode et coups de gueule.
Nommé en mars, le secrétaire d’Etat français à l’économie solidaire, premier du genre, croit en l’Afrique. Le continent inventeur de toutes les solidarités doit bénéficier de nouveaux systèmes d’aide et de coopération de la part de l’Europe : micro crédit, commerce équitable, labels éthiques sont le credo de Guy Hascoët. Qui défend aussi une méthode : un mélange d’écoute, de mise en réseau, et de combat politique au sein du gouvernement, comme sur la scène internationale.
Afrik. : Vous avez publiquement affirmé que l’une des priorités de votre ministère sera le développement solidaire dans le tiers monde, et particulièrement en Afrique. Quels types de projets avez-vous dans les cartons ?
Guy Hascöet : Ce n’est pas moi, ni mon équipe qui faisons les projets. Les grands desseins imposés d’en haut, c’est la politique à la papa. Nous allons cibler notre action sur trois chantiers. Le premier consiste à donner une lisibilité politique aux filières économiques qui rémunèrent correctement les habitants de pays à faible PIB. Il faut donner à ces initiatives locales un écho international, amplifier les réseaux et faire reconnaître aux organismes internationaux de douanes et d’agrément qui n’ont pas ce genre de préoccupation, les acteurs, les réseaux et des labels garantissant les nouvelles formes d’échanges équitables que nous cherchons à instaurer.
Second chantier : coordonner les organismes financiers d’épargne éthique et solidaire, mais aussi les Mutuelles, la Caisse d’Epargne, les Coopératives, avec les réseaux de terrain, comme les gérants de fonds de garantie, pour que des populations soucieuses de créer une activité économique leur permettant de vivre aient accès au crédit.
Troisième chantier : travailler sur les ressources existantes. Il faut orchestrer le travail des organismes financiers avec les politiques locaux, les réseaux institutionnels nationaux et internationaux. Partout où il y a du contact, nous souhaitons qu’il y ait du partenariat. Notre conviction est que la globalisation doit faire émerger de nouveaux réflexes, d’autres pertinences.
afrik : Concrètement cela donne quoi ?
GH : Lors de mes discussions avec Laurent Fabius, j’ai évoqué l’idée d’un label ISO éthique au niveau européen. Et je peux vous affirmer qu’il n’y est pas hostile.
Mais ce souci de transparence et d’éthique est aussi fort chez les acteurs financiers. Lorsque je leur demande à quelles conditions ils veulent s’impliquer en Afrique, ils répondent que la meilleure garantie pour eux, c’est un régime qui rompt avec l’ère post-coloniale et s’engage dans un réel processus démocratique.
Plus concrètement, j’ai sous mes yeux des projets de petites technologies, portés par des gens qui ont mis le doigt sur des réalités locales marquées par la pénurie d’infrastructures industrielles. Ainsi ce système permettant de réfrigérer l’eau par l’énergie solaire et de stocker le mil. Ainsi cette machine, assez simple technologiquement, capable d’agréger des résidus de mil ou de sorgo en briques combustibles au rendement dix fois plus important que le bois. Quand on connaît les problèmes que pose la pénurie de bois de chauffage au Sahel, c’est considérable !
En plus c’est exportable !
afrik : Quelles sont les réactions de vos réseaux sur place quand vous les entretenez de ces projets comme les ambassades, les ONG, les experts et chefs d’entreprise ?
GH : (Très énervé) Arrêtez de planer. S’il vous plaît, posez des questions sérieuses. Cela fait six semaines que ce ministère existe, je me bats pour boucler les budgets et obtenir le matériel nécessaire pour que les 30 personnes qui y sont rattachées travaillent dans de bonnes conditions. Alors, non, je n’ai pas tissé ma toile à l’échelle mondiale.
Nous sommes dans une phase exploratoire d’échange et d’approche, avec un événement fort sur le commerce équitable prévu en 2001.
afrik : A propos de commerce équitable, avez-vous retenu des priorités de soutien à des secteurs économiques particuliers ?
GH : Non. Ce n’est pas à moi de décréter quels sont les géographies et les thèmes à soutenir. Mon rôle, c’est d’être à l’écoute des porteurs de projets et de débloquer les situations. De fait, en Afrique nous allons travailler sur les grands flux agricoles comme le cacao et le café, ou le petit artisanat de transformation. Au Maghreb, ce sera plutôt le textile. Si l’on peut accélérer les crédits dans des pays en voie de démocratisation, tant mieux, mais planifier depuis Paris, le développement d’un pays souverain, c’est l’inverse de notre démarche.