L’édition française du magazine Vogue crée la polémique dans son dernier numéro « Spécial top-model ». L’objet du crime : plusieurs pages d’un éditorial mode sur lequel le mannequin hollandais Lara Stone a le visage et le corps peints en noir.
Indifférent, semble-t-il, à l’émotion suscitée, le magazine parle simplement du « sens de l’humour » de son modèle qui s’est prêtée à cette transformation. Censé mettre en avant les mannequins qui ont des courbes, en opposition aux égéries anorexiques, Vogue a plutôt attiré les foudres pour racisme en Angleterre et aux Etats-Unis. En France, où les réactions sont rares, l’association de lutte contre le racisme SOS Racime estime que le magazine a manqué de tact.
Vogue, que certains surnomment la « bible de la mode », est un magazine toujours à la pointe de la tendance et ses rédactrices en chef des prêtresses ou demi-déesses qui font et défont les modes.
Quand l’édition française sort, il y a quelques jours, un de ses numéros le plus attendu, le spécial top-model, tous les fashionistas se l’arrachent. Mais surprise : dans un numéro qui est censé mettre en avant les top-models du moment, on ne peut pas s’empêcher de constater l’absence de mannequins noirs. Et pour enfoncer le clou, dans un édito dont le but est de célébrer le retour des mannequins « en chair », on remarque que le mannequin est une blanche peinte en noir. « Shocking », s’indignent nos voisins anglais. Il n’y aurait donc pas un seul mannequin noir disponible pour faire cette séance photo ?
Vogue, qui a déjà essuyé plusieurs accusations de racisme – il y a très peu de Noires et d’Asiatiques en couverture et dans le magazine – est de nouveau au cœur de la polémique. L’édition française, réputée pour ses prises de risques et ses séances photos très avant-gardistes, ne faillit pas a sa réputation. L’objet du scandale aujourd’hui en Grande-Bretagne et aux Etats-Unies est une séance mise en scène par la rédactrice en chef Carine Roitfelt et photographiée par Steven Klein. Elle montre le mannequin hollandais Lara Stone avec le visage et le corps peints ou maquillés en noir dans différentes poses. Le texte, qui accompagne les illustrations, n’indique pas les raisons pour lesquelles la peau du mannequin a été assombrie. Une brève introduction se contente de préciser que les poses révèlent « le sens de l’humour du mannequin », ajoutant que « sa silhouette tout en courbes marque une rupture de la tendance des modèles anorexiques ». Le mannequin est décrit comme « une vraie femme de corps et de caractère pour qui le plaisir, comme le sens de la métamorphose n’est pas la moindre des qualités. Les photos de la transformation sont au nombre de 4 sur 14 pages. De quoi, en plus de rappeler la façon péjorative dont les Noirs étaient montrés dans les médias au début du siècle dernier, créer la polémique aux Etats-Unis et en Angleterre. Vrai débat ou comme Shakespeare le dit si bien « Much Ado about nothing? » (beaucoup de bruit pour rien) ?
En attendant, le site de beauté américain Jezebel, a été le premier à s’insurger. Il accuse Carine Roitfeld et Steven Klein d’être « culturellement insensibles » en publiant ces images. « Ils devraient savoir que peindre des blancs en noir pour le divertissement d’autres blancs est offensant dans des proportions qui dépassent la chose culturelle.» Ces photos arrivent après que des participants à une émission de la télé australienne se sont peints le visage en noir la semaine dernière pour imiter les Jackson 5.
« Le shooting n’avait certes pas d’intentions racistes mais il a manqué de tact. Si l’objectif était artistique, et non pas de faire passer le modèle comme une fille noire, la multitude de réactions que ces photos ont provoqué montre que le monde des images (pub, mode, etc.) est maintenant en train de payer pour n’avoir pas permis pendant longtemps les Noirs de montrer leurs corps au public», rapporte le Daily Mail
Vogue a réagi en indiquant qu’il ne savait pas que ces photos étaient blessantes. Joint plus tard par la chaîne américaine d’informations en continu,CNN, elle ne fera pas d’autres commentaires. Le racisme dans la mode a toujours été un des plus gros secrets de polichinelle. Tout le monde est au courant mais très peu en parlent. Doit-on pour autant tout se permettre au nom de la mode et de l’art ?