La société Clonaid, laboratoire de clonage humain liée au mouvement religieux de Raël, s’installe en Afrique. C’est à Abidjan qu’elle a décidé d’élire domicile et sera opérationnelle dès janvier prochain. La chimiste Brigitte Boisselier, PDG de la société, fait face à la controverse et explique sa démarche. Interview.
La société de clonage humain Clonaid, a décidé de poursuivre ses activités en Afrique. Elle installe une partie de ses laboratoires à Abidjan. La nouvelle antenne sera opérationnelle dès janvier prochain. Liée au mouvement religieux des Raëliens – considéré comme une secte -, l’entreprise développe depuis 2000 la technique du clonage et a déjà procédé à l’implantation d’embryons viables chez l’homme. Pour Brigitte Boisselier, PDG de Clonaid, les perspectives médicales sont énormes. La chimiste revient sur ses préceptes religieux pour expliquer sa conception du clonage et annonce que son travail en Afrique ne concernera, dans un premier temps, que les animaux.
Afrik : Pourquoi avez-vous décidé de vous installer en Afrique ?
Brigitte Boisselier : Nous avons beaucoup de demandes en Afrique. Nous avons de nombreuses demandes d’Afrique du Sud, de Côte d’Ivoire, de la Tunisie, du Maroc et même du Congo. C’est vrai que la demande n’est pas culturelle. Mais la question se pose pour les couples infertiles ou les personnes qui perdent des enfants. Après, les freins sont essentiellement religieux. L’amarrage catholique est moins fort en Afrique. J’ai participé à de nombreux débats radio ou télé en Afrique avec des scientifiques et des juristes et j’ai constaté qu’ils avaient une plus grande ouverture d’esprit que les occidentaux.
Afrik : Vous avez eu de gros déboires avec l’administration américaine qui à mis un terme à vos activités aux Etats-Unis. En vous installant à Abidjan, on pourrait légitimement vous accusez de profiter du vide juridique total en matière de clonage humain en Afrique…
Brigitte Boisselier : Nous n’avons pas l’intention de transférer tous nos labos à Abidjan. Notre activité concerna uniquement dans un premier temps le clonage bovin. Pour créer des cheptels plus performants. Il n’est pas encore question de clonage humain.
Afrik : Le clonage humain pose un problème étique extrêmement délicat. Comment expliquez-vous les nombreuses levées de boucliers ?
Brigitte Boisselier : La clonage humain véhicule une image de Frankenstein. D’un point de vue religieux classique, tout ce qui touche à la reproduction humaine relève du divin, une naissance est un cadeau de Dieu et non des hommes. En dehors de ces considérations, les personnes se basent sur les films hollywoodiens ou les livres sur les armées de clones. Et pour les dérives possibles du clonage ce n’est pas aux individus qu’il faut s’adresser mais aux gouvernements. On avait assisté à un même tollé général à la fin des années 70, pour le premier bébé éprouvette. Il existe un cycle d’acceptation d’une dizaine d’année. Aujourd’hui nous sommes dans des réactions intermédiaires. Certains pays ou Etats, comme la Californie -qui été le premier à interdire les recherches en 1998- commencent à légaliser les recherches sur les cellules souches.
Afrik : En quoi le clonage serait-il une bonne chose ?
Brigitte Boisselier : La culture des cellules souches offre, à elle seule, d’immenses perspectives médicales. Elles portent tout le codage génétique de l’individu et peuvent remplacer n’importe quelles cellules du corps humain. En les implantant vous introduisez des cellules neuves. A terme, en matière de médecine réparatrice on pourra faire de nouveaux foies, de nouveaux reins.
Afrik : Mais si l’on considère le clonage complet d’individus, on s’éloigne des applications purement médicales pour toucher aux questions idéologiques. En tant que raëlienne, qu’elle est exactement votre vision du clonage?
Brigitte Boisselier : Le raëlisme est une religion athée dans le sens où, pour les raëliens, il n’y a pas de Dieu. La vie sur terre a été créée par des êtres venus d’ailleurs. Raël (fondateur du mouvement), au même titre que Moïse ou Mahomet, est un prophète envoyé par nos créateurs pour nous apporter un message sur terre. Le clonage est pour nous une manière d’atteindre une forme de vie éternelle car, en reproduisant à l’identique la cartographie d’un cerveau, il permettra bientôt de transférer une personnalité dans un nouveau corps. Il s’agit du même principe de réincarnation que l’on peut trouver dans d’autres religions.
Clonaid
L’entreprise Clonaid a été créée en 1997, par Raël, quelques semaines après Dolly, le premier cas de clonage réussi sur un être vivant (une brebis). La société à entièrement été cédée à la chimiste Brigitte Boisselier, raëlienne elle même. Clonaid annonce avoir développé ses premiers embryons en septembre 2001, ses premiers embryons viables en février 2002 et procédé aux premières implantations humaines en mars dernier. La société dispose d’une machine, de fabrication sud-coréenne, la RMX 2010, capable de réaliser la fusion, par impulsion électrique, entre un ovocyte énucléé (sans noyau) et le code génétique d’un donneur. Quatre scientifiques africains, ivoiriens et burkinabés, ont été sélectionnés pour travailler dans les futurs laboratoires d’Abidjan.
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