Depuis le début du conflit entre l’armée soudanaise et les Forces de soutien rapide (FSR), il y a 20 mois, un groupe d’avocats pro-démocratie s’est engagé à documenter les atrocités commises, notamment les frappes aériennes aveugles et les attaques contre des civils. Ce conflit a fait des dizaines de milliers de morts, plus de 11 millions de déplacés et est à l’origine de l’une des crises humanitaires les plus graves de ces dernières années, selon l’ONU.
Le dernier rapport de ce groupe d’avocats fait état d’un bombardement particulièrement meurtrier qui s’est produit le jour du marché hebdomadaire dans une ville du Darfour. Selon l’organisation, plus de 100 personnes ont perdu la vie dans l’attaque, tandis que des centaines d’autres, dont des femmes et des enfants, ont été blessées. Le marché, fréquenté par des habitants venus des villages alentours, a été visé délibérément, dans ce qu’on décrit comme une frappe ciblant une zone densément peuplée.
L’organisation humanitaire dénonce la stratégie militaire de l’armée soudanaise qui semble se concentrer sur les zones résidentielles, entraînant des pertes civiles massives. En réponse, l’armée soudanaise a démenti toute responsabilité dans cette attaque, qualifiant les accusations de « mensonges » diffusés par les partisans des FSR. Dans un communiqué, elle a affirmé qu’elle poursuivait son « droit légitime à défendre le pays ». Toutefois, les preuves recueillies, telles que les vidéos envoyées à l’AFP et montrant les scènes de destruction après l’attaque, alimentent les accusations contre l’armée.
La moitié des habitants déplacés par les violence
Sur ces images, des civils sont vus fouillant dans les décombres tandis que les corps de plusieurs enfants carbonisés gisent sur le sol brûlé. Le groupe Emergency Lawyers a également documenté des frappes aériennes dans la ville de Nyala, dans le Darfour-Sud, où des barils explosifs ont frappé plusieurs quartiers, provoquant des destructions considérables, bien que l’on ne sache pas encore si ces attaques ont fait des victimes. Ces frappes sont dénoncées comme des « frappes aveugles », visant de façon indiscriminée des zones résidentielles et démentant les affirmations de l’armée selon lesquelles ses attaques se concentrent uniquement sur des cibles militaires.
La situation au Darfour est particulièrement préoccupante. Cette vaste région, de la taille de la France, abrite environ un quart de la population soudanaise. Cependant, plus de la moitié de ses 10 millions d’habitants ont été déplacés par les violences. En juillet, un rapport soutenu par les Nations unies a révélé qu’une famine sévissait dans le camp de réfugiés du Darfour-Nord, à la suite d’un siège prolongé par les FSR qui a coupé les échanges commerciaux et l’accès à l’aide humanitaire.
Des civils ciblés délibérément
Ce groupe d’avocats, qui œuvre pour la documentation des crimes de guerre et des violations des droits humains, a aussi rapporté un autre incident tragique : le crash d’un drone non identifié le 26 novembre dans le Kordofan-Nord, dans le centre du pays, qui a tué six personnes. Les forces armées régulières, sous le commandement du général Abdel Fattah al-Burhane, et les FSR du général Mohamed Hamdane Daglo, sont accusées de cibler délibérément des civils et de mener des attaques aériennes aveugles, sans distinction entre objectifs militaires et civils, depuis le début du conflit en avril 2023.
Le bilan humain du conflit est lourd, et la situation ne cesse de se détériorer. Les accusations de violations des droits humains se multiplient, alors que l’armée soudanaise et les FSR poursuivent leur lutte pour le contrôle du pays, laissant derrière elles des destructions massives et une population dévastée. Dans ce contexte, les efforts pour documenter ces atrocités sont cruciaux pour rendre compte des exactions commises et pour permettre une réponse internationale face à l’escalade de la violence.