Le leader algérien affronte la plus grosse crise de sa carrière de Président. La coalition qui le soutient devra désormais faire sans la participation du parti kabyle, le RCD.
Pressé de réagir, le pouvoir, visiblement débordé par l’ampleur de cette
insurrection populaire, s’est prononcé publiquement sur cette crise lundi soir, par la voix du président Bouteflika qui intervenait à la télévision publique. Ce n’est pas sous la pression des événements que le Président pouvait annoncer des avancées importantes en direction des revendications kabyles, et cette prise de parole ne pouvait les satisfaire immédiatement.
Il a néanmoins fait le choix de tirer au clair les responsabilités dans l’enchaînement des violences, par la nomination d’une commission d’enquête indépendante, composée de personnalités de la société civile. Ce sera à cette commission d’apprécier l’attitude de la force publique et les éventuels excès commis. Cette décision est une avancée. Sera-t-elle suffisante à calmer les impatiences de tous types qu’exprime la jeunesse soulevée ?
Le RCD sur le départ
On voit mal comment le RCD, parti très implanté en Kabylie et organisateur du 21e anniversaire du » Printemps Kabyle » (quand la région avait connu des émeutes semblables) aurait pu rester dans un gouvernement qui fait tirer sur ses électeurs. Or son départ renforce le déséquilibre de représentation au sein de l’exécutif. Et le sentiment de minorisation qui prévaut au sein de l’électorat kabyle.
Nombre d’observateurs de la scène politique algérienne notent que ce divorce entre RCD et pouvoir arrange les deux parties. Le RCD ne pouvant » plus justifier moralement » sa présence dans la coalition craint qu’à la faveur des émeutes son fief passe entièrement à son rival de toujours, le FFS d’Hocine Aït Ahmed. Le pouvoir, éternellement allergique à ce dernier, lâcherait la bride au RCD afin qu’il puisse reconquérir ses fiefs, se réservant l’option d’une nouvelle alliance une fois la crise terminée.
Or au vu de la gravité de la situation en Kabylie, il se pourrait fort bien que ce genre de calculs politiques soient caducs. S’ils s’avéraient réels ils jetteraient une lumière crue sur l’incompréhension d’une crise qu’Alger n’a pas su prévenir, et qu’Abdelaziz Bouteflika aurait tort de minimiser. D’où son message de lundi soir, en forme de « je vous ai compris ».