L’assassinat de l’opposant emblématique Chokri Belaïd, mercredi, a embrasé la Tunisie. Les manifestations ont tourné au drame : un policier se trouve dans le coma après avoir été tabassé jeudi par des manifestants. Lors des heurts d’hier, les Tunisiens qui sont descendus dans la rue ont notamment incendié un poste de police à Gafsa. Le principal syndicat UGTT appelle à la grève générale ce vendredi. Contacté par Afrik.com, Vincent GEISSER, Chercheur à l’Institut français du Proche Orient (Ifpo Beyrouth), nous indique que la violence politique se banalise en Tunisie.
La Tunisie à feu et à sang. De nouvelles manifestations sont attendues ce vendredi en Tunisie, dans le cadre des funérailles de Chokri Belaïd. L’emblématique opposant au parti islamiste Ennahda a été assassiné mercredi devant chez lui. Une exécution politique qui a plongé le pays dans le chaos.
Un policier se trouve dans le coma après avoir été tabassé cette nuit par des manifestants, à Gafsa. Dans cette même ville, les manifestants ont incendié un poste de police. Et, on s’attend à un vendredi sous haute tension avec l’appel à la grève de la centrale syndicale UGTT qui compte 500.000 membres. « En raison de la grève générale, les transports tournent au ralenti ce matin à Tunis et de nombreux vols de la compagnie nationale Tunisair sont annulés. En ville, les rues sont désertes, et seuls de rares bus sont visibles. Le tramway de Tunis semble cependant fonctionner mais les rames, d’ordinaire bondées vers 8 heures 30 (heure de Paris) sont largement vides », rapporte LeFigaro.fr.
« Radicalisation idéologique et politique »
Contacté par Afrik.com, Vincent GEISSER, Chercheur à l’Institut français du Proche Orient (Ifpo Beyrouth), nous indique que la violence politique se banalise en Tunisie.
Est-ce que la Tunisie est au bord de la guerre civile ? « Non. Le mot guerre civile est trop fort. C’est une situation de crise, un bouleversement des repères. Il s’agit d’une radicalisation idéologique et politique. Ce qu’on redoutait est arrivé : on assiste à une division entre laïques et islamistes. Malheureusement ce qu’on voit dans la rue c’est le produit de cette radicalité », nous déclare Vincent GEISSER, Chercheur à l’Institut français du Proche Orient (Ifpo Beyrouth). Et d’ajouter : « Ce sont les radicaux de chaque camp qui ont gagné la partie contre le peuple. Les ultraconservateurs imposent leur position aux plus modérés et pragmatiques. Et, dans le camp des laïques, les partisans du dialogue sont devenus totalement inaudibles. Ce sont ceux qui prônent la radicalisation qui se font entendre. Alors que la Tunisie fait face à des problèmes socio-économiques, à l’inégalité de développement ainsi qu’au chômage des jeunes ».
Ce vendredi, de nouvelles manifestations sont prévues. Comment cette crise politique et sociale peut se terminer ? « Il s’agit d’un assassinat politique. C’est totalement nouveau dans la culture politique tunisienne. Même si depuis l’indépendance, il y a eu de la violence politique en Tunisie, ce qui est (presque) inédit c’est l’assassinat politique. C’est quelque chose de fort rare, la Tunisie n’a jamais connu une violence politique à la libanaise. Et son mode opératoire est choquant : une figure de l’opposition qui se fait assassiner en bas de chez lui », constate le spécialiste de la Tunisie. « La violence politique se banalise en Tunisie. C’est un phénomène de déstabilisation et c’est le peuple tunisien qui est pris en otage », ajoute-t-il.
La France a appelé ses 25 000 ressortissants à la prudence et a annoncé la fermeture, vendredi et samedi, de toutes les écoles françaises en Tunisie, soit 7 000 élèves privés d’enseignements à cause du mouvement social en Tunisie.