Monia Boulila a la poésie au cœur. Depuis des années, elle ne cesse de produire en arabe et en français. Réel pont entre le Maghreb et l’Europe, elle a également décidé de faire connaître des œuvres francophones à des lecteurs arabes et des œuvres arabes au public francophone. Se qualifiant de Berbère, Carthaginoise, Romaine, Africaine, Arabo-musulmane, méditerranéenne et francophone, cette femme de lettres est avant tout une citoyenne du monde dont la vocation est de réunir les peuples derrière l’étendard de la culture.
AFRIK.COM : Madame Boulila, nous vous laissons le soin de vous présenter librement à nos lecteurs…
Monia Boulila : Je suis une poétesse tunisienne, bilingue (arabe et français) et traductrice, mais aussi ambassadrice universelle de la paix auprès du Cercle universel de la paix à Genève, membre de l’Union des écrivains tunisiens, membre des Ecrivains de la paix et des « poètes du monde ».
Par ailleurs, je suis membre fondatrice de l’association culturelle Majida Boulila pour la modernité et membre du Comité du festival de jasmin de Sfax.
Plusieurs de mes poèmes sont traduits en roumain, en espagnol et italien et publiés dans diverses revues littéraires, d’autres sont traduits en anglais et en espagnol et diffusés dans le monde par le Cercle universel des ambassadeurs de la paix.
J’ai également obtenu plusieurs prix dont le Prix Européen Francophone Charles Carrère 2016 et le Prix spécial du Jury de l’association « L’Ours Blanc » à Paris en 2008.
AFRIK.COM : Vous avez publié des recueils et vous faites beaucoup de traduction, pouvez-vous nous en parler davantage ?
Monia Boulila : J’ai six recueils de poésie en langue française dont le dernier « Transhumance Sacrée » aux éditions l’Or du Temps-Tunisie et « Epopée féminine », un livre d’art numérique en collaboration avec l’artiste belge Jean-Jacques Oppringils.
J’ai de même un recueil de poésie en langue arabe édité en Algérie chez Lazhari Labter édition. J’ai aussi participé à plusieurs anthologies dont l’anthologie de « Femmes poètes du monde arabe » aux éditons le Temps des Cerises, « l’Anthologie des poèmes d’amour des Afriques et d’Ailleurs » aux éditions Orphie France et l’anthologie « Eloge et défense de langue française » aux éditions Unicité.
J’ai par ailleurs fait de la traduction pour une trentaine de poètes du monde arabe et une dizaine de poètes francophones. J’aime traduire des poèmes. Pour traduire, je dois entrer dans le monde du poète et du poème, ce qui m’enrichi beaucoup et fait vibrer mes notes de musique.
Je dois noter que seulement trois recueils de poèmes traduits de trois poètes arabes (Cherif Boughzil de Libye, Sonia Khader de Palestine et Isam Alsadi de Jordanie) ont été édités ; car éditer de la poésie n’est plus facile en ces temps et notamment en langue française -qui est de moins en moins utilisée en Tunisie- mais cela ne m’empêche pas de continuer à traduire et faire entendre la voix des poètes arabes aux francophones et celle des poètes francophones aux poètes arabes.
AFRIK.COM : Si vous deviez citer vos trois poètes préférés, qui seraient-ils ? Pour quelles raisons ?
Monia Boulila : Mon choix se base sur le fait que ces poètes sont les premiers à m’avoir fait découvrir la magie de la poésie. Je vais me permettre de choisir trois poètes français et trois poètes arabes : Victor Hugo, Charles Baudelaire, Alphonse de Lamartine, Ahmed Rami (à travers les belles chansons d’Oum Kalthoum), Khalil Gibran et Nizar Kabani… J’aime aussi la poésie de Pablo Neruda !
AFRIK.COM : Quel est votre rapport avec votre pays, la Tunisie? Et avec l’Afrique ?
Monia Boulila : La Tunisie est mon amour, mon paradis. La Tunisie se trouve en Afrique, donc je ne peux être Tunisienne sans être Africaine!
Je suis une personne qui ne cesse d’ouvrir ses bras pour élargir le cercle de son appartenance. Je suis multiple : Berbère, Carthaginoise, Romaine, Africaine, Arabo-musulmane, méditerranéenne et francophone.
En 2016, j’ai d’ailleurs reçu le prix Européen Francophone Charles Carrère dont je suis très fière, il me relie davantage à l’Afrique!
AFRIK.COM : Comment avez-vous vécu la révolution tunisienne de 2010-2011 ?
Monia Boulila : Comme mes compatriotes j’ai participé et j’ai cru à la Révolution. Après les élections de 2011 tout l’espoir s’est dissipé…
Je suis très affectée par tout ce qui s’est passé (assassinats politiques, terrorisme…) dans mon pays durant la période de transition démocratique. J’ai écris plusieurs poèmes et textes en rapport avec ces évènements vécus.
Etant une personne optimiste, je garde espoir pour l’émancipation de mon pays et l’instauration de la démocratie… Certes le chemin est long et ardu mais on peut dire que nous sommes sur la bonne voie.
AFRIK.COM : Vous êtes « partenaire » du site AFROpoésie (www.afropoesie.com), est-ce important pour vous de participer à ce projet en tant que femme de lettres maghrébine ?
Monia Boulila : La poésie et le mot constituent un espace privilégié d’expression et d’échanges. Plus que jamais l’écriture est, pour moi, l’outil idéal pour l’avancement des idées et l’arme la plus efficace pour mener les combats pour un monde plus juste, plus ouvert, plus tolérant, plus solidaire… un monde plus beau.
Grâce à la poésie, je fais entendre ma voix et la voix d’autres poètes (par la traduction) dans le monde. Participer à ce projet ne peut être que riche et bénéfique.
AFRIK.COM : Quels sont vos objectifs pour les prochains mois ?
Monia Boulila : Je prépare mon deuxième recueil de poésie en langue arabe. Je prépare aussi, avec des artistes français, un spectacle qui sera présenté à Paris au mois d’avril 2018. Enfin, j’ai une pièce de théâtre qui sera jouée à Paris l’année prochaine (projet en cours).
AFRIK.COM : Si vous deviez conseiller à nos lecteur un seul des vos poèmes pour leur donner l’envie de vous lire après cet entretien, lequel choisiriez-vous ?
Monia Boulila : C’est un peu difficile de faire un choix !
Je vais en choisir un issu du recueil « Ailes et frissons », aux éditions l’Or du Temps.
L’espace d’une feuille…
J’ai l’espace d’une feuille pour
Devenir Reine !
Posséder le printemps et défier le vent
Renverser les nuages et cueillir les étoiles
Ramasser les instants du temps
J’ai l’espace d’une feuille pour
Traverser le désert et oublier l’absence
Habiller l’ombre et remplir le silence
Rattraper la trace et assécher le mirage !
J’ai l’espace d’une feuille pour
Faire briller le soleil
Etaler mon ombre sur les distances
Faire couler l’encre du désir
Enfoncer ma pointe dans une nouvelle page
Rassembler le puzzle d’une vie !
Oui, J’ai apprivoisé l’espace d’une feuille
Et, depuis lors, j’ai appris
en scribe attentive
A déjouer l’alphabet et écrire mon nom !
NB : Et à ne pas oublier, pour découvrir plus de poètes d’Afrique et des Caraïbes… Le site AFROpoesie !