Le Président tunisien par intérim, Moncef Marzouki, a provoqué un incident diplomatique entre son pays et l’Egypte. L’ambassadeur d’Egypte à Tunis a été rappelé et les Emirats Arabe Unis menacent de suspendre leurs investissements en Tunisie. Mais qu’a donc fait le dirigeant tunisien ?
L’Egypte est remontée contre la Tunisie. Après des semaines de silence, le Président tunisien est sorti de son mutisme, non pas pour commenter les avancées politiques de son pays en proie à une crise depuis plus de deux mois, mais pour lancer un pavé en Egypte. En effet, à la tribune de l’Assemblée générale des Nations Unies le 26 septembre, Moncef Marzouki a épinglé l’armée égyptienne et l’a exhorté à libérer le Président destitué, Mohamed Morsi. Il a également appelé à la libération des « prisonniers politiques » (Frères musulmans, ndlr) alors que ces derniers sont en Egypte considérés comme des individus ayant incité au terrorisme et à la violence.
Les autorités égyptiennes n’ont pas mis long feu à réagir. Ils perçoivent les propos du Président de la transition tunisienne comme une ingérence. Le ministère égyptien des Affaires étrangères a publié un communiqué où il rejette et condamne les propos de Moncef Marzouki qui, selon le communiqué, vont à l’encontre de la volonté du peuple égyptien.
La presse tunisienne aussi n’y va pas de main morte avec le dirigeant tunisien. Tunisienumerique.com écrit par exemple : « Notre président de la République est-il au moins au courant que le mouvement « Frères musulmans » est désormais dissout et que ses principaux leaders sont arrêtés, accusés et poursuivis pour des inculpations d’ordre pénales et non pour des motifs politiques (du moins selon la version officielle) ».
Pris en otage par les Frères musulmans
Le conseiller du président de la République, Azize Krichène, a tenté, ce mardi, de sauver la face de Marzouki. Il a affirmé que ce discours était une manière pour le Président de faire évoluer les positions en Egypte et de marquer son soutien au processus transitoire dans le pays, en raison des fortes similitudes avec la Tunisie. Force est de constater que la seule chose qu’a déclenchée Moncef Marzouki est l’ouverture d’une brèche, sans compter l’intrusion des Emirats Arabes dans le « malentendu » opposant ces deux pays d’Afrique du Nord. Les Emirats Arabes Unis ont d’ailleurs menacé de retirer leurs investissements de la Tunisie.
Mais les conséquences sont avant tout d’ordre diplomatiques, puisque l’Egypte a rappelé le 28 septembre son ambassadeur à Tunis. Rappelons que le Président tunisien avait fait les mêmes déclarations en juillet 2013. Mais à l’époque, probablement en raison de l’état critique de l’Egypte, les autorités n’avaient pas commenté les dires de Moncef Marzouki.
L’ancien ambassadeur d’Egypte à Tunis, Mokhles Kotb, s’est dit surpris des déclarations du Président tunisien qui devrait, selon lui, s’occuper des affaires internes de son pays et du peuple tunisien qui fait face « à un régime fasciste tant dénoncé du temps de Ben Ali ».
Dans des déclarations à l’agence de presse du Moyen Orient le 30 septembre, Mokhles Kotb s’est étonné que Moncef Marzouki soit encore à ce jour président de la République tunisienne. Selon lui, son discours à l’ONU prouve qu’il est pris en otage par l’Occident et les Frères musulmans qui lui dicteraient la politique à suivre, afin de se maintenir au pouvoir.