Le procès en appel du rappeur tunisien Weld el 15 a été reporté au 2 juillet. Ce dernier qui a entamé une grève de la faim a été condamné en première instance à 2 ans de prison ferme pour avoir insulté la police tunisienne dans l’une de ses chansons.
Le procès en appel du rappeur tunisien Alaa Yaâcoubi, alias Weld el 15, qui devait avoir lieu ce mardi, a été reporté au 2 juillet suite à sa condamnation le 13 juin à deux ans de prison ferme. L’affaire Weld 15 est suivie de près par la jeunesse tunisienne et tout particulièrement par les rappeurs, dont certains se sont mobilisés pour faire libérer l’artiste. Son tort ? Avoir insulté les policiers de chiens dans l’une de ses chansons. La justice accomplit bien évidemment son travail mais la peine de deux ans de prison ferme est jugée absurde par la société civile tunisienne. D’autant plus que « tout le monde en Tunisie sait que les policiers sont des chiens », affirme certains à l’image de Hind Meddeb, journaliste tunisienne, née en France d’un père tunisien et d’une mère maroco-algérienne. Elle vivait à Tunis depuis le soulèvement populaire de janvier 2011, avant de fuir le pays pour la France depuis le verdict du procès le 13 juin.
La coauteure du documentaire « Méditéranéennes », diffusé mardi 18 juin sur France 2, était présente au procès du rappeur. Hind Meddeb, comme beaucoup d’autres, a affiché dès le début de l’affaire un soutien incontestable au rappeur condamné. Mais pourquoi a-t-elle décidée de quitter la Tunisie ? Selon des témoins, à l’écoute du verdict, la journaliste s’est levée et s’est écriée : « Boulicia kleb » (les policiers sont des chiens, ndlr). C’est cette insulte qui a mené Weld el 15 en prison. A la fin du procès, les soutiens du rappeur s’agitent, expriment verbalement leur colère, leur indignation face à un verdict démesuré. La police se met à matraquer les militants. Hind Meddeb est arrêtée. Selon un témoin présent au procès, le matraquage des militants aurait été prévu par les policiers bien avant le début du procès.
Hind Meddeb est libérée 7 heures après avec une convocation à se présenter au tribunal. Elle décide de quitter le pays mais se dit prête à revenir à condition « d’être informée » et de se sentir « face à une justice normale ».
Grève de la faim
Hind Meddeb fait partie de ces Tunisiens qui ne comprennent pas que des assaillants qui attaquent une ambassade n’écopent que de deux ans de prison avec sursis et qu’un rappeur soit condamné la même peine, ferme, « pour un texte, des mots ». « Sous Ben Ali, on ne disait rien, tout le monde intégrait la dictature et la nécessité de se taire, les artistes se cachaient, les rappeurs restaient anonymes… Aujourd’hui, c’est beaucoup plus vicieux, on fait croire à une liberté, et on finit par des procès de droit commun qui cachent du délit d’opinion ! », a-t-elle précisé dans une interview accordée à Télérama.
Dans l’attente du procès en appel désormais prévu au 2 juillet, la demande de remise en liberté provisoire a été refusée au rappeur. En signe de contestation, Alaa Yaâcoubi a entamé une grève de la faim jusqu’au procès en appel. Les avocats de la défense ont plaidé pendant trois heures d’audience en faveur du respect de la liberté artistique et d’expression.
Présenté dans un premier temps comme un banal procès, peu médiatisé, il est aujourd’hui devenu un procès « politique ». Selon ses avocats, Weld el 15 est de fait devenu un « prisonnier politique ». Certains préviennent la justice tunisienne que la liberté d’expression doit être respectée et ne peut être retirée ou condamnée, surtout depuis janvier 2011. Il n’y a pas d’autres alternatives, Weld el 15 doit être libéré au risque d’observer une capitale s’enflammer, préviennent les soutiens du rappeur à l’instar du chanteur tunisien Bendir Man.