Tunisie : la menace vient du ciel


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Illustration du blog Débat Tunisie
Illustration du blog Débat Tunisie

Il est peu de dire que la liberté d’expression est limitée en Tunisie. Le Président Ben Ali, candidat à sa propre succession le 25 octobre, occupe l’ensemble de l’espace public. L’agence de presse officielle dicte pour ce faire aux médias ce qu’ils doivent rapporter. Mais l’arrivée de médias satellitaires basés à l’étranger laisse désormais aux citoyens la possibilité de disposer d’une version alternative.

Le Président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali a fait, en septembre, la sortie des mosquées. La radio religieuse Zitouna, dont son gendre Sidi El Materi est propriétaire, a en effet distribué à la sortie de la prière des sacs en plastique portant la mention « Ben Ali 2009 ». Cet exemple est choisi dans un rapport par la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) pour illustrer l’omniprésence du chef de l’Etat dans l’espace public. Suite à un appel du Président Ben Ali il y a presque trois ans, des milliers d’associations professionnelles ou caritatives ont été mobilisées en permanence pour défendre son œuvre de réforme. Enfin, on ne compte plus dans les rues de Tunisie les affiches et banderoles à la gloire du président. Leur installation a eu lieu bien avant le 11 octobre, premier des treize jours de campagne officielle avant l’élection du 25 octobre.

Louanges de Ben Ali dans la presse écrite

Le 7 novembre 2008, Ben Ali a déclaré « Nous avons constamment œuvré à promouvoir les libertés publiques et, en premier lieu, la liberté d’expression, et pris maintes initiatives et mesures au profit du domaine de l’information ». Voici donc la façon dont le journal Le Temps a décrit, le 31 août, l’annonce de la candidature du Président :

« Les manifestations de joie et d’allégresse à l’occasion de la présentation par le Président Zine El Abidine Ben Ali de sa candidature […] se sont poursuivies dans les différentes régions du pays. Ces festivités et ces rassemblements, [ont été] marqués par une ambiance festive et de liesse populaire, […] [où les participants brandissaient] des banderoles exprimant la fidélité à la Tunisie et [affirmaient un] soutien indéfectible au Président Ben Ali […]. Les participants […] ont scandé des slogans affirmant la cohésion autour des choix judicieux du Chef de l’Etat afin qu’il poursuive la conduite de la marche réussie de la Tunisie vers davantage de progrès et de prospérité. »

La presse n’est pas en reste : malgré les deux cents journaux répertoriés, seuls trois titres, édités par des partis d’opposition, osent une critique frontale du pouvoir. Reporters sans frontières (RSF) dénonce les pressions exercées par le régime sur les marchands de journaux pour éviter qu’ils ne les distribuent. Le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL), parti de Mustapha Ben Jaafar, a ainsi dû réduire drastiquement le nombre d’exemplaires imprimés de son journal Mouwatinoun (« Citoyens »), vendu désormais principalement par les militants eux-mêmes. Les journaux Essabah et Le Temps, qui s’autorisaient parfois quelques libertés par rapport à la ligne officielle, ont été rachetés par Sidi El Materi, déplore la FIDH. Ne reste, dans la presse sous influence, que Réalités pour « s’essaye[r] à une timide liberté de ton ».

L’accès aux sites Internet et blogs dont le contenu déplaît au pouvoir, à l’image d’Afrik.com, sont par ailleurs systématiquement censurés. Les blogueurs tunisiens ont par ailleurs inventé le personnage fictif de « Ammar 404 », en référence à l’« erreur 404 » indiquant sur Internet une adresse introuvable. Egalement surnommé « Mkass » (« ciseaux »), il représente à leurs yeux la censure exercée par l’Agence tunisienne d’Internet (ATI).

Le mur de la désinformation se fissure

La chaîne de télévision Hannibal TV et la station de radio Mosaïque FM ont marginalisé depuis quelques années les médias officiels, selon RSF. On y a aborde des sujets ayant trait à l’identité, la sexualité, le chômage, l’émigration, le népotisme dans les affaires, etc. Mais demeure un grand interdit : les dossiers politiques de fond. Les bulletins d’information restent par ailleurs alignés sur l’agence officielle, Tunis Afrique Presse.

Les chaînes satellitaires ont par contre causé un véritable bouleversement en mettant fin au traitement unilatéral de l’information. La FIDH relève que la chaîne qatarie Al Jazira, qui reçoit régulièrement des opposants au régime, est l’objet de nombreuses campagnes de dénigrement. Ces attaques sont particulièrement fortes depuis juillet, après la couverture d’une conférence sur le droit au retour des Tunisiens exilés. France 24 et la BBC invitent également occasionnellement des opposants à s’exprimer sur leurs antennes.

Une télévision sous contrôle

Lors de la précédente période électorale, en 2004, l’émission française de décryptage des médias, Arrêt sur images, a consacré un sujet à la télévision publique tunisienne. Le tableau dressé, encore valable aujourd’hui, ne laisse que peu de place au doute, quant au type de régime en place en Tunisie.

 
L’image d’illustration est issue du blog Débat Tunisie.

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