Les récents affrontements entre salafistes et le gouvernement d’Ennahda en Tunisie ont marqué un tournant dans la lutte contre le Salafisme radical. Un violent affrontement a opposé dimanche 19 mai forces de l’ordre et salafistes à Ettadhamon, dans la banlieue de Tunis. Le bilan est lourd : 1 mort, une trentaine de blessés et 274 arrestations.
Ettadhamon restera à jamais gravé dans les mémoires. La journée de dimanche en Tunisie a été marquée par une violence toute particulière. Après l’interdiction de tenir un congrès par le parti au pouvoir d’Ennahda, les islamistes d’Ansaar al-Sharia ont fait parler d’eux.
Le ton du président d’Ennahda était menaçant et catégorique il y a une semaine. Mais il n’a pas empêché que le pire se produise. « Le meeting d’Ansar al-Sharia n’aura pas lieu, s’il n’obtient pas l’autorisation du gouvernement », avait déclaré Rached Ghannouchi.
Salafistes contre islamistes
La guerre des frères aura bien lieu. Dimanche 19 mai, ceux que Rached Ghannouchi appelait « ses enfants », ont bien tenu parole. Ils se sont d’abords rassemblés à Kairouan pour tenir leur fameux meeting. Mais face à un déploiement très efficace des forces de l’ordre sur les lieux, les salafistes font machine arrière et annulent le congrès.
Ils dévoilent sur leur page Facebook un autre lieu de rendez-vous : Ettadhamon. Mais les forces de l’ordre ne sont jamais loin. Le face-à-face finit par déraper. Dans la foulée, un jeune de vingt-sept ans, Moez Dahmani, est tué. Le gouvernement pointe du doigt les salafistes et les accuse d’avoir provoqué les heurts, en lançant des pierres et des cocktails Molotov aux forces de l’ordre.
« Aucune réaction rigoureuse n’a été faite par l’Etat »
L’heure est au bilan. Lors d’une conférence de presse lundi 20 mai, le porte-parole du ministère de l’intérieur, Mohamed Ali Laroui révèle le bilan total des arrestations : 274 individus dont 84 recherchés et 38 en possession de différentes armes notamment des cocktails Molotov. Il fait également état d’un mort et d’une trentaine de blessés parmi les agents de l’ordre et les manifestants.
Le bilan reste salé et les autorités ne lâchent rien. En déplacement au Qatar, le Premier ministre Ali Laarayedh hausse le ton. « Nous allons faire face aux salafistes jihadistes avec une extrême fermeté, mais dans le cadre de la loi. Nous serons inflexibles ».
Une déclaration de fermeté. Même si certains dénoncent un laxisme. Interrogé au micro d’Europe 1, Ahmed Nejib Chebbi, leader du parti républicain, déclare : « nous avons souffert d’un laxisme de la part du gouvernement et particulièrement du ministère de l’intérieur dirigé par Ali Laarayedh. Aucune réaction rigoureuse n’a été faite par l’Etat ».