Tourisme sexuel en Côte d’Ivoire : de l’éthique au sanitaire


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Drapeau de la Côte d'Ivoire
Drapeau de la Côte d'Ivoire

Principal moyen de l’inscrire dans la croissance de l’économie mondiale, le tourisme est une véritable opportunité d’expansion pour les commerces locaux des pays d’Afrique. L’un d’entre eux, le commerce du sexe, pôle attractif d’un certain type de tourisme, tend à devenir un dangereux vecteur de propagation du VIH.

S’il n’est pas à l’origine du plus vieux métier du monde, le tourisme a largement contribué à son développement. Les professionnelles sont supplantées par des étudiantes qui, afin de payer leurs frais de scolarité, offrent leurs services d’  » hôtesses-accompagnatrices  » aux estivants dans les hôtels les plus huppés de Cocody, quartier résidentiel d’Abidjan. Ou encore, par des coiffeuses, commerçantes ou fonctionnaires qui, n’ayant plus de revenus fixes en raison de la présente situation économique, trouvent une solution ponctuelle à leurs problèmes financiers.

Le débat sur le tourisme sexuel, longtemps resté d’ordre éthique, prend une dimension de plus en plus sanitaire. En effet, si aucune étude ne permet de faire une nette corrélation entre l’avancée de l’épidémie et le tourisme, certaines, en revanche, mettent en parallèle les migrations de populations et les flux de transmissions. Ainsi, la Côte d’Ivoire, carrefour interethnique est plus touchée que le Sénégal dont à son tour les tribus migrantes, les Toucouleurs et les Peuls, accusent un taux de séroposivité trois fois plus important que les sédentaires. Après les prostituées, les groupes dits  » à risques  » sont en Côte d’ivoire, les camionneurs, les militaires, avec un taux de prévalence, respectivement, de 15% et 14, 7%. Groupes migrants par excellence, les touristes représentent potentiellement un vecteur d’expansion de la maladie d’autant plus dangereux que les politiques, par crainte d’entraver la croissance, n’ont mis aucun moyen de prévention en place à leur égard.

Tourisme sexuel, dangereux allié du VIH

Arrive enfin, le développement d’autres groupes à risque. Selon l’association française Afrique-sida, une faculté abidjanaise accusait cette année un taux de contamination de 48% chez les étudiantes, taux équivalent au milieu de le prostitution, alors qu’il y dix ans encore, il était insignifiant. De même certains secteurs d’activité en rapport avec le tourisme semblent être plus touchés que d’autres. C’est le cas notamment de l’hôtellerie, de la restauration et de l’animation où les décès imputables au VIH sont passés au premier plan en ce qui concerne les départ des entreprises, devant la retraite qui n’en représente plus que 2%, alors qu’elle occupait le premier rang en 1980. Chose d’autant plus alarmante, que la seule mesure préventive de base, le préservatif, est aussi la moins utilisée par les touristes eux-mêmes, qui, dans leur recherche hédoniste ou par négligence, l’emploient peu.

D’ailleurs, on remarque que les touristes portent leur choix sur des filles de plus en plus jeunes, certainement dans l’espoir de réduire les risques de transmission.

Aujourd’hui, la tranche d’âge la plus touchée se situe entre 15 et 25 ans. Sur les 12 000 personnes chaque jour infectées en Afrique, les 2/3 sont des jeunes. De manière générale, on déplore le fait que certains touristes, malgré une solide information préventive, ne soient pas davantage à l’initiative du port du préservatif, dont le coût moyen est de 100 à 200 francs CFA, dans un pays où le salaire moyen d’un fonctionnaire oscille autour de 20 000.

Mal sans frontière, le sida, trouve en la quasi-absence d’informations et de prévention des pays d’Afrique subsaharienne, une véritable opportunité d’évolution. Le sida cause 1 mort sur 5, mais il reste souvent occulté par les tabous les plus tenaces et traité de plus en plus fréquemment par les médecines traditionnelles, financièrement plus abordables.

La rareté des centres de dépistage dans les grandes villes ivoiriennes, se transforme en pénurie totale dans les campagnes les plus reculées. Les quelques campagnes de prévention gouvernementales et la distribution parcimonieuse de préservatifs à la fiabilité douteuse, masquent mal le fait que les autorités ne subventionnent aucune aide à la médication. La nivaquine est un luxe, la trithérapie, une utopie.  » Prévenir, c’est aussi sensibiliser les touristes sur les réalités du sida dans le continent, affirme M Ekollo, président de l’association Afrique-sida, par le biais de courts métrages dans les avions, de panneaux préventifs dans les aéroports ou les agences de voyage, ou par la distribution systématique de préservatifs dès l’arrivée sur le territoire. Tous les acteurs économiques du marché touristique se doivent d’engager une partie de leurs bénéfices dans la lutte contre le sida !  »

Certaines compagnies aériennes et chaînes d’hôtels, sensibles à l’appel, ont déjà mis en place des dispositifs préventifs afin que le tourisme ne devienne pas le premier instrument de propagation de la maladie.

Eugénie Lobé

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