Lancé le 10 septembre 2024, l’émission de télé-réalité « The Bachelor », présentée par Emma Lohoues et diffusée sur la chaîne Canal+ Afrique, suscite une vive polémique dans plusieurs pays africains. En République démocratique du Congo (RDC), au Burkina Faso et au Niger, les autorités de régulation ont suspendu ou interdit la diffusion de ce programme. Elles invoquent des motifs liés à la protection de la jeunesse et au respect des valeurs culturelles africaines.
« The Bachelor », qui en est à sa troisième saison sur Canal+ Afrique, met en scène un célibataire – Lamine Cissokho, un Sénégalais de 34 ans, diplômé en droit des affaires, banquier, acteur et mannequin – devant choisir une compagne parmi vingt prétendantes. Ce format, inspiré de la télé-réalité occidentale, suscite des critiques en Afrique pour sa mise en concurrence des participantes et la manière dont il réduit la quête de l’amour à une compétition télévisée.
Au Burkina Faso, le Conseil Supérieur de la Communication (CSC) vient d’annoncer l’interdiction de la diffusion de la troisième saison de « The Bachelor ». Dans un communiqué, le régulateur a jugé l’émission « stigmatisante pour la femme africaine, non protectrice de la jeunesse et contraire aux valeurs et aux mœurs du pays« . A noter que Wenky, la candidate du Burkina Faso a été la première éliminée pour avoir affirmé que le plus important selon elle était la situation financière de son futur conjoint.
Des accusations similaires ont été portées par le Conseil Supérieur de la Communication du Niger, qui a également ordonné l’arrêt de la diffusion du programme, considérant qu’il porte atteinte aux valeurs nationales et à la dignité des femmes africaines. En parallèle il est cependant intéressant de remarquer la faible représentation des femmes dans le gouvernement de ce pays.
En RDC, des arguments analogues ont conduit à la suspension de l’émission. Selon plusieurs sources, les autorités congolaises ont également critiqué la manière dont les participantes sont représentées. Notamment le format de l’émission, où 20 prétendantes se disputent l’attention d’un célibataire, perpétue des stéréotypes nuisibles à l’image de la femme africaine.
Un débat sur l’adaptation des programmes audiovisuels étrangers en Afrique
L’interdiction de « The Bachelor » au Burkina Faso, au Niger et en RDC repose la question de l’adaptation des programmes audiovisuels occidentaux sur le continent africain. L’émission, très populaire et appréciée des annonceurs, se heurte aux sensibilités culturelles et aux exigences morales de plusieurs pays, qui dénoncent une influence négative sur les valeurs locales.
En septembre 2023, un débat similaire avait éclaté au Cameroun, où la chaîne « Canal+ Elles » avait été temporairement suspendue pour avoir diffusé des programmes jugés contraires aux mœurs locales, notamment en raison de « pratiques obscènes, à tendance homosexuelle« . Cette suspension reflète le durcissement de la position de certains pays africains vis-à-vis de l’homosexualité. En effet, elle est désormais présentée comme allant à l’encontre des valeurs traditionnelles et utilisée politiquement dans le cadre d’une volonté d’affranchissement de l’influence étrangère.
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Une coopération entre États pour harmoniser les politiques de diffusion
L’interdiction de « The Bachelor » par le Burkina Faso et le Niger s’inscrit également dans un contexte de rapprochement politique entre ces deux pays et le Mali, membres de l’Alliance des États du Sahel. Ces trois nations, qui se sont retirées de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) après la crise politique au Niger, travaillent désormais ensemble pour harmoniser leurs politiques, y compris dans les domaines des communications et des médias.
Pour l’instant, la diffusion de l’émission se poursuit dans les autres pays de la zone francophone subsaharienne.