Le textile chinois fait trembler les pays du pourtour méditerranéen. La fin de quotas menace les pays comme le Maroc, la Tunisie et la Turquie, qui exportaient jusque-là 90% de leur production vers l’Europe. Impossible, en effet, de concurrencer des coûts de production chinois dix fois moins élevés.
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La fin des quotas sur les exportations de textiles chinois pèse lourdement sur les économies des pays du pourtour méditerranéen. « Un tiers environ des emplois de la zone risque d’être sévèrement affecté » par cette concurrence, estime Jean-François Limantour, président du Cercle euro-méditerranéen des dirigeants du textile-habillement, une association regroupant des industriels et distributeurs de la région.
Le secteur du textile-habillement constitue le premier employeur industriel dans la quasi-totalité des pays de la zone, avec 7 millions d’emplois directs. En Tunisie et au Maroc, plus de 200 000 personnes sont respectivement employées dans le textile (entre la moitié et le tiers des emplois de l’industrie). En Turquie, un million de salariés travaillent dans le secteur (un quart des emplois industriels). Ces trois pays exportent 90% de leur production vers l’Europe, quasiment sans droits de douane.
Impossible de concurrencer la Chine
Si les pays du pourtour méditerranéen connaissent un tassement de leur activité depuis déjà deux ou trois ans, « ils ont été fragilisés sur la période récente car la dernière phase de suppression des quotas (achevée le 1er janvier) a concerné des produits qui figuraient au premier rang de leurs exportations comme les T-shirts, les produits maille ou le pantalon », explique Gildas Minvielle, économiste à l’Institut français de la mode. Ainsi en janvier et février, les exportations marocaines de textile ont chuté de 22% par rapport à l’année précédente, a indiqué le 25 avril à Rabat Mohamed Tazi, directeur général de l’Association marocaine des industries du textile et de l’habillement.
« Ces pays ne peuvent pas se battre sur les coûts. C’est perdu d’avance », estime François-Marie Grau, directeur des affaires économiques internationales de l’Union française des industries de l’habillement (UFIH). « Le salaire d’une ouvrière de confection au Maroc ou en Tunisie est d’environ 200 euros par mois, contre 20 ou 25 euros en Chine », souligne M. Limantour.
Seule stratégie pour s’en sortir, « passer de la sous-traitance à la co-traitance », c’est-à-dire à la fabrication de produits finis, explique M. Grau. Autre stratégie possible, « fabriquer en de très courts délais de petites séries, ce que les Chinois n’arrivent pas à faire avec leurs gros volumes », selon M. Grau.
Le Maroc, l’Egypte et la Tunisie ont réclamé une aide technique de l’Union européenne pour faire face aux produits chinois, a indiqué le 27 avril le ministre tunisien de l’Industrie dans un entretien au journal marocain L’Economiste. « Nous lui avons demandé de prendre un minimum de mesures de sauvegarde (…) ». M. Chelbi a également souligné l’importance d’une aide de l’UE à la formation dans la filière du textile. « Car pour fabriquer des produits haut de gamme, il faut beaucoup d’expertise », a-t-il dit. « Il faudrait aussi que nous puissions participer aux programmes européens de Recherche et Développement dans le secteur du textile-habillement, chose que nous n’avons pas le droit de faire actuellement », a déploré le ministre tunisien.