Un policier des RG du département du Rhône-Alpes, en France, a demandé par courriel au Conseil régional de lui fournir des renseignements sur la religion du personnel. L’affaire fait grand bruit. Les responsables musulmans qui sentent leur religion visée demandent des explications claires de l’Etat, en dépit de la sanction de l’auteur du courriel.
Les musulmans de Rhône-Alpes ne décolèrent pas, après la découverte d’un courriel envoyé par un policier au Conseil régional pour demander des renseignements sur la religion du personnel. Vendredi soir, les responsables du Cercle des décideurs musulmans (Cdm), où siègent notamment Azzedine Gaci, président du Conseil Régional du Culte Musulman (CRCM) et Kamel Kabtane, recteur de la Mosquée de Lyon, se sont réunis à Lyon, sur la question. Objectif de cette deuxième rencontre à laquelle participaient également certains élus musulmans des conseils municipaux, mettre sur pied des stratégies d’actions. « Nous n’excluons pas de saisir la Haute autorité contre les discriminations (Halde) ou la justice, dans les prochains jours », a déclaré le recteur de la Mosquée de Lyon, joint au téléphone par Afrik.com.
Une première réunion en fin de matinée s’était terminée sur un communiqué, dans lequel les responsables musulmans se disaient « choqués » par la démarche du policier. Ils émettaient aussi le souhait de rencontrer le chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, pour évoquer le problème. Mais ils ne seront pas reçus à l’Elysée. A en croire Kamel Kabtane, c’est en effet le cabinet du Ministre de l’Intérieur qui leur a répondu, pour leur proposer une audience avec un des cadres du cabinet de Michelle Alliot Marie, la ministre de l’Intérieur.
Une réaction a minima qui ne satisfait pas les responsables du Cdm. « Nous n’irons pas à la rencontre du Directeur du cabinet de la ministre ou de l’adjoint de celui-ci. Vu la gravité de cette affaire, nous maintenons notre souhait d’être reçu par une haute autorité politique. Il faut qu’on nous dise qui est visé par ce courriel » a affirmé Kamel Kabtane à Afrik.com.
Une initiative individuelle ou une enquête commanditée par la hiérarchie ?
De fait, mi septembre, la direction des ressources humaines du Conseil régional de Rhône-Alpes reçoit un courriel d’un agent de la sous-direction de l’Information générale de la Direction départementale de la Sécurité publique du Rhône, anciennement les Renseignements généraux. Le policier veut savoir s’il y a « des agents de confession autre que chrétienne » parmi le personnel. « Dans l’affirmative, pouvez-vous me dire si certains d’entre eux ont demandé des aménagements d’horaire ou de service pour pratiquer leur religion ? », ajoute-t-il. Le président PS du Conseil général, Jean-Jack Queyranne, désapprouve cette démarche et interpelle la ministre de l’Intérieur sur ce projet qui, pour lui, porte gravement atteinte aux libertés publiques.
Peu après, Michèle Alliot Marie évoque une initiative personnelle du policier auteur de la lettre. La ministre de l’Intérieur déclenche aussi une enquête dans son département, laquelle conclut que le policier a agi seul. Sanction : un blâme et une mutation d’office dans un service où il n’entendra plus parler de renseignement. Mais l’explication du ministère de l’Intérieur ne convainc pas tout le monde. Sur la foi d’informations exclusives, Europe1 affirme par exemple que le policier « aurait reçu des consignes de la part de sa hiérarchie pour réaliser une « étude sur l’influence du communautarisme religieux sur les milieux économiques et institutionnels » ».
Pour les musulmans du Rhône Alpes, l’affaire est donc loin d’être clause. « Je m’étonne que les associations de défense des droits de l’homme comme le Mrap, la Licra et autres, d’habitude si prompt à réagir lorsqu’il s’agit de droits de l’homme demeurent silencieuses. En tout cas, nous poursuivront jusqu’à obtenir des réponses claires », promet Kamel Kabtane.