Tempête judiciaire au Ghana : la présidente de la Cour suprême suspendue


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Gertrude Torkornoo

Le Ghana est secoué par la suspension historique de Gertrude Torkornoo, présidente de la Cour suprême, visée par plusieurs pétitions pour mauvaise conduite. Une première dans l’histoire du pays, qui interroge sur l’indépendance du pouvoir judiciaire et marque un tournant dans la lutte anticorruption engagée par le président Mahama.

C’est un séisme sans précédent dans le paysage judiciaire ghanéen. Gertrude Torkornoo, présidente de la Cour suprême depuis moins d’un an, a été suspendue de ses fonctions mardi 22 avril par le président John Dramani Mahama. Cette décision, prise en consultation avec le Conseil d’État, intervient dans un contexte d’allégations graves de mauvaise conduite. Le Ghana, salué pour sa stabilité démocratique en Afrique de l’Ouest, fait face à une mise à l’épreuve inédite de ses institutions.

Une décision présidentielle aux implications lourdes

La suspension de Gertrude Torkornoo n’est pas anodine : c’est la première fois dans l’histoire du pays qu’un président de la Cour suprême en exercice est écarté dans le cadre d’une enquête officielle. Selon la présidence, trois pétitions distinctes avaient été soumises, appelant à sa révocation. Si les détails précis restent confidentiels, certaines sources évoquent des accusations de falsification de dossiers judiciaires et d’usage abusif de fonds publics. Pour le chef de l’État, qui a promis une croisade anticorruption dès le début de son mandat en janvier, cette mesure s’inscrit dans une volonté affichée de restaurer l’intégrité institutionnelle.

Un comité spécial composé de cinq membres a été formé pour mener les investigations. Il est présidé par le juge de la Cour suprême Gabriel Pwamang, et rassemble des personnalités issues du monde juridique, académique et administratif. Ce panel devra établir la véracité des accusations portées contre la magistrate, tout en respectant les procédures de la Constitution de 1992. En attendant les conclusions de cette commission, Gertrude Torkornoo reste suspendue, plongeant la plus haute juridiction du pays dans une période d’incertitude.

Un précédent qui interroge sur l’indépendance du pouvoir judiciaire

L’affaire Torkornoo soulève de nombreuses questions sur la séparation des pouvoirs au Ghana. La rapidité de la suspension, bien que conforme aux règles constitutionnelles, a suscité des débats houleux dans les cercles juridiques et politiques. Certains y voient une manœuvre politique, d’autres une tentative légitime de moralisation de l’appareil judiciaire. Dans tous les cas, cette suspension met en lumière les tensions latentes entre l’exécutif et le judiciaire dans un pays souvent cité comme modèle de gouvernance démocratique.

Gertrude Torkornoo, âgée de 61 ans, avait été nommée en juin 2023 en tant que quinzième président de la Cour suprême du Ghana. Elle était la troisième femme à accéder à ce poste prestigieux, après une longue carrière dans la magistrature et un parcours salué pour son érudition. Aujourd’hui, son avenir professionnel et sa réputation sont suspendus à l’issue d’une enquête qui pourrait redéfinir les contours de l’autorité judiciaire au Ghana.

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