Tchalé, une vraie bête de scène


Lecture 5 min.
arton9421

Le vendredi 27 janvier dernier, au Centre Culturel Français de Cotonou (Bénin), Tchalé, un exceptionnel bluesman béninois, lançait son premier album, Voodoo-Tché. Mais ne vous y méprenez pas, si le musicien en est à son premier album, il a plutôt derrière lui, nombre d’années de scène, qui l’ont vu monter et faire des shows sur des podiums d’Afrique, comme d’Europe. Et les thèmes que propose ce premier opus de dix titres, parlent de pardon, de fête, d’amour, de tromperie…

De notre correspondant Arnold Senou

« C’est grâce à la scène que j’existe ». L’homme qui parle ainsi s’appelle Tchalé, même si il a plus à voir avec les génies qu’avec les hommes. Pour ce virtuose de la guitare électrique, qui a débuté dans les chorales de chant des églises, les scènes des festivals africains et européens qu’il a foulées ont, à chaque fois, gardé le souvenir d’un homme qui se transcende quand ses pieds foulent les estrades. Tchalé est un bluesman qui compose avec son histoire. Voilà pourquoi sa musique va chercher dans les rythmes traditionnels béninois, avec des percussions africaines et des paroles très souvent chantées dans les dialectes béninois et togolais.

Tchalé, un homme de scène

Là où ce vieux briscard de la musique (malgré son âge pas très avancé) prend de la hauteur, malgré sa taille modeste, est bien entendu la scène. Il est 21 h ce vendredi 27 janvier quand les musiciens devant l’accompagner font leurs derniers réglages et que, de son éternel bob en toile noire, Tchalé, de son vrai nom Oswald Mélé, chausse sa guitare électrique de marque Fender et se dirige vers le micro central. C’est parti pour 2h environ de bonheur, de plaisir et de jubilation, où il aura même le talent de reprendre avec belle réussite, le « Little wings » de Jimi Hendrix. Au gré des titres de son album, où son énergie décuple peu à peu, il passe d’une guitare électrique Fender à une Gibson, et ne cesse à aucun moment de pincer les cordes. Et à chaque fois, il devient comme possédé par un dieu, certainement le voodoo, et il entre en transe. Une transe scénique qui le fait vibrer, se plier en deux tout en grattant, et se jeter sur ses genoux le buste en avant, la tête jetée sur le dos. Puis, comme écoutant une voix intérieure qui lui demande de s’approprier totalement la scène, il se redresse tout en continuant de jouer, se déplace latéralement, horizontalement, vers l’avant, l’arrière, retourne se mettre en face d’un de ses musiciens et les deux hommes se mettent de nouveau à faire parler leurs instruments. Ses envolées solo et très bluesy, comme sur le titre « Kete kete », laissent le public sans voix et ce n’est que quand les autres musiciens se remettent à rentrer dans la partie, qu’unanimement, des mains, par centaines, se rejoignent pour féliciter l’exploit du maître de cérémonie de ce soir-là.

Un album original dans le paysage musical béninois

Sur les dix titres de ce premier album intitulé Voodoo-Tché, ce qui signifie « Mon dieu », l’un des plus grands titres qui vous sautent très vite à l’oreille est « Mojo ». Il parle de son Dieu qui est vivant, et qui le protège de tous les malheurs. Soutenue par les percussions de Bonaventure, les claviers de Guy et la batterie de Gabin, la musique de la chanson « Mojo » prend ses influences dans un mélange de rythmes traditionnels africains et occidentaux.
Dans « Julianna », la voix sincère et propre de Tchalé supplie sa dulcinée de ne pas le quitter. D’abord, l’harmonica d’Emmanuel, un bluesman français, vient prêter main-forte à la plainte d’Oswald. Ensuite, comme pour s’assurer une réussite totale de cette mission délicate, le chanteur a mis toutes les chances de son côté en allant chercher les services de Sabine, aux chœurs. Et, la voix sublime et mielleuse de la jeune femme vient, comme il se doit, en renfort à la prière de Tchalé, pour faire changer son avis, à la femme aimée. Sur « Minton minton », une chanson très bluesy, les envolées solitaires du musicien, nous montrent son amour pour les géants de cette musique que sont les BB King et autre John Lee Hooker et surtout, son attachement à cet instrument de musique, à six cordes.

Voodoo-Tché, au final, avec ses dix titres, reste un album original et attachant dans le paysage musical béninois. Les autres thèmes abordés sont la demande de pardon à son prochain et les trompettes de Sam et Eric et le trombone de Sam sur « Kete kete », y viennent vous souffler un air frais et bienheureux dans les oreilles, comme pour pousser à l’oubli des fautes et au retour d’une forte amitié entre les anciens ennemis. Sur « Akoba » qui parle de désobéissance (et de l’une de ses conséquences qu’est, entre autre, le malheur qui en découle), la guitare sèche qu’y a adopté Tchalé, souligne bien l’indocilité du chanteur, cette insoumission de ce musicien qui ne veut pas être rangé dans un genre musical unique qu’est par exemple, le blues.

Démarrez l’année par l’écoute de Voodoo-Tché de Tchalé, et vous ne serez pas déçu. A son sujet, est-il encore besoin que je vous rappelle, qu’il est impératif d’aller voir cette vraie bête de scène quand il passera pas loin de chez vous, parce que, c’est sur les podiums que ce fauve est lâché!

Logo Afrik.com
La rédaction d'Afrik, ce sont des articles qui sont parfois fait à plusieurs mains et ne sont donc pas signées par les journalistes
Facebook Instagram
Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News