Après une folle équipée victorieuse à travers tout le Tchad, la colonne rebelle est prise dans N’Djamena comme dans une souricière. Déby tient bon, au centre d’une capitale en flammes.
Tout s’était passé si facilement jusque là, pour les rebelles tchadiens, qui avaient pénétré depuis le Soudan jusqu’au coeur de N’Djamena avec une déconcertante facilité. L’attaque-éclair semblait avoir pris de court toute résistance de l’armée régulière tchadienne. L’entrée dans N’Djamena aux premières heures du matin, samedi 2 février, avait confirmé cette faiblesse des résistances tchadiennes. La conquête du Palais présidentiel et la chute d’Idriss Déby Itno semblaient une formalité…
L’enlisement de l’offensive
La journée de dimanche a semblé infirmer les pronostics de la veille : la colonne rebelle n’est que de 2000 hommes et elle est extrêmement éloignée de ses bases arrière. Autant dire qu’elle est condamnée à une victoire rapide, car tout enlisement des combats risque de l’épuiser. Le fait d’avoir pris la plus grande partie de N’Djamena ne constitue pas nécessairement une victoire : car prendre n’est pas tenir.
Depuis dimanche 3 février au matin, l’armée nationale tchadienne a sorti les grands moyens : les chars et les hélicoptères, qui constituent des remparts solides pour ce combat urbain, face aux 4×4 équipées de mitrailleuses lourdes dont sont dotés les rebelles. Tant et si bien que dimanche 3 février au soir, pour autant que la situation soit lisible, l’enlisement des combats dans la capitale risque de la transformer en souricière pour les rebelles. Dispersés, les affrontements sont confus et leurs issues difficiles à déterminer.
Le Président Idriss Déby Itno, pour sa part, assure à la communauté internationale qu’il tient la situation en main, et que l’armée nationale s’est ressaisie et s’apprête à reprendre le contrôle de la capitale, malgré la mort, dès vendredi, de son chef d’Etat-major, tombé dans les combats livrés entre Dagana et Massaguet, à quelques dizaines de kilomètres de N’Djamena.
La violence et les pillages
La confusion croissante sur le front militaire a malheureusement des conséquences tragiques sur les populations civiles de N’Djamena : les accalmies des combats permettent à de nombreuses familles de s’enfuir, les étrangers, de plus en plus nombreux, regroupés dans quelques points de la capitale que sécurisent les troupes françaises, sont progressivement évacués depuis la nuit de samedi à dimanche par des avions gros porteurs de l’armée française qui effectuent des rotations entre Libreville et N’Djamena.
La France, restée neutre tout au long des affrontements qui se déroulent sous les yeux des soldats français présents à N’Djamena, a même mis à l’abri des combats éventuels autour de l’aéroport ses avions « Mirage », qui ont été eux aussi se mettre au vert à Libreville.
Ainsi désertée par une aprtie de ses habitants et par toute autre force que celles de rebelles et de l’armée nationale tchadienne qui s’affrontent, N’Djamena offre en de multiples endroits des scènes de pillage et de désordre, magasins saccagés, habitations dévalisées, vols et violences… De loin en loin, de noires fumées révèlent des incendies, et les rues sont parfois jonchées de cadavres, fruit des combats des dernières heures, que personne n’ose recueillir…
Il aura suffi de quelques heures pour que la bataille bascule. Et il est de plus en plus difficile de prédire son issue.
Pour suivre le fil des événements :
3 février au matin : Le Président tchadien cerné par les rebelles
2 février mi-journée : Les rebelles prennent N’Djamena
1er février mi-journée : la bataille de Massaguet
31 janvier : Percée spectaculaire de la colonne rebelle au Tchad