Tchad : des Français arrêtés pour « trafic d’enfants »


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La police tchadienne a arrêté, jeudi, neuf français accusés d’avoir « enlevé » une centaine d’enfants originaires de l’Est du Tchad et du Darfour dans le but de les faire accueillir en France moyennant finances. Le président tchadien, Idriss Deby Itno, a promis vendredi que les auteurs de l’opération seraient « sévèrement sanctionnés ».

Neuf Français qui s’apprêtaient à quitter le Tchad en compagnie de 103 enfants ont été interpellés par la police tchadienne. Les français soupçonnés de « trafic d’enfants » ont été placés en garde à vue à Abéché, la principale ville de l’est du Tchad et ont été « remis » au procureur de la localité pour faire toute la lumière de cette affaire », a déclaré à l’AFP, un collègue du secrétaire d’Etat tchadien à l’intérieur, Abderamane Djasnabaille.

Idriss Deby Itno a déclaré, vendredi, que les responsables de l’opération controversée et avortée seraient « sévèrement sanctionnés ». Il a qualifié l’opération de cette association d’ « inhumaine », « impensable » et « inadmissible ».

Parmi les personnes arrêtées, on compte huit membres de l’ONG « Arche de Zoé », dont le président de l’association, Eric Breteau. Cette organisation française, à l’origine de l’opération baptisée « Children Rescue », avait affirmé qu’elle désirait ramener en France des orphelins de la région soudanaise du Darfour, « pour les sauver d’une mort certaine ».

Le ministre de l’intérieur tchadien, Ahmat Mahamat Bachir a précisé à Reuters que les français « n’avaient aucune autorisation officielle. Nous avons ouvert une enquête ». Selon le porte parole du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), les enfants enlevés ont, pour la majorité, entre quatre et cinq ans et ne sont pas tous orphelins.

Un acte « illégal » et « irresponsable »

Dans un entretien à Aujourd’hui en France/le Parisien, Rama Yade, la secrétaire d’Etat aux affaires étrangères et aux Droits de l’Homme, a estimé que l’enlèvement de ces enfants par l’association Arche de Zoé était « illégal et irresponsable ».

« On ne sait rien des conditions du regroupement de ces enfants, on ne connaît rien de leurs origines, de leur nationalité et de la réalité de leur situation familiale et communautaire », ajoute-t-elle. Rappelant qu’elle avait saisi la justice jeudi matin pour « déterminer toutes les responsabilités de cette opération », Rama Yade a indiqué que « les responsables de cette association devront rendre des comptes ».

« Le terme de « trafic d’enfants » dénature totalement la nature de l’association et celui de « mercenaires » porte atteinte aux responsables bénévoles dont on peut dire tout au plus qu’ils ont fait preuve d’une « désobéissance civile » », a déclaré « l’Arche de Zoé », qui sollicite l’appui des autorités françaises pour permettre la libération de son équipe.

Enlèvement ou évacuation ?

Le président de l’ONG, a affirmé que les 103 enfants devaient faire l’objet d’une « évacuation sanitaire en direction de Paris », a rapporté la radio tchadienne. Mais, selon la radio, « ces enfants ne sont pas du tout malades, ils (les responsables de l’ONG) ont bandé leur tête et pieds pour donner l’impression que ces enfants sont malades ».

Trois cent familles de France et de Belgique ont payé pour que les enfants soient acheminés vers un aérodrome situé à Vatry, près de Reims, à 120 km à l’est de Paris. Selon une source diplomatique, « elles auraient payé entre 2 800 et 6 000 euros pour recevoir un enfant ».

Ces familles rassemblées depuis jeudi à l’aéroport pour attendre l’avion du Tchad affrété avec 103 enfants à son bord venus du Darfour, ont passé la nuit sur place, a-t-on appris vendredi auprès d’un des responsables de l’association à l’origine de l’opération. Elles ont dormi dans des sacs de couchage et sur des matelas dans le hall de l’aérogare, laissé ouvert sur autorisation du préfet.

La radio française Europe 1, qui a révélé l’information, a affirmé que les enfants auraient été enlevés au Soudan puis transportés au Tchad dans le cadre d’un « trafic » d’adoption. La guerre au Darfour et ses conséquences ont fait, depuis février 2003, 200.000 morts, et ont déplacé plus de deux millions de personnes, laissant la part belle au « trafic d’enfants ».

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