Tanzanie : Tundu Lissu visé par une accusation de trahison à l’approche des élections


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Tundu Lissu
Tundu Lissu

La Tanzanie est secouée par l’inculpation de Tundu Lissu pour « trahison », un chef de l’opposition emblématique. Son arrestation, sur fond de discours contestataire, relance les craintes d’une répression politique à l’approche d’un scrutin déjà sous tension.

À quelques mois des élections générales prévues en octobre, la scène politique tanzanienne est secouée par l’inculpation de Tundu Lissu, leader emblématique de l’opposition et président du principal parti contestataire, le CHADEMA. Accusé de « trahison », un chef d’accusation passible de la peine de mort, l’homme politique a été arrêté à la suite d’un rassemblement dans le sud du pays. Son arrestation fait craindre un durcissement du climat politique dans un pays encore marqué par des années de restrictions démocratiques.

Une arrestation qui ravive les tensions politiques

C’est à Mbinga, dans la région de Ruvuma, que les forces de sécurité ont interpellé Tundu Lissu mercredi soir, alors qu’il venait de s’adresser à ses partisans pour dénoncer l’absence de réformes électorales. Conduit de force dans un véhicule de police, il a été transféré à plus de 1 000 kilomètres de là, au tribunal de Kisutu à Dar es Salaam. Accompagné de ses avocats et de figures de l’opposition, Lissu est apparu souriant, mais la gravité des accusations portées contre lui ne laisse guère place à l’insouciance.

L’accusation de trahison repose sur une déclaration tenue par Lissu lors d’un précédent rassemblement à Dar es Salaam : « Nous empêcherons l’élection. Nous inspirerons la rébellion. » Pour les autorités, ces propos visent à saper l’autorité de l’État. Or, selon ses défenseurs, il s’agirait avant tout d’un discours politique dénonçant l’absence de transparence électorale et appelant à une réforme du système. Son avocat, Rugemeleza Nshala, dénonce une manœuvre politique visant à faire taire un opposant influent, dans un contexte où le CHADEMA continue de réclamer une commission électorale indépendante.

Un précédent lourd et un retour d’exil fragile

Tundu Lissu n’en est pas à sa première confrontation avec le pouvoir. En 2017, il avait survécu à une tentative d’assassinat qui l’avait contraint à s’exiler en Belgique. Ce n’est qu’en 2023, après la levée de l’interdiction des rassemblements politiques par la présidente Samia Suluhu Hassan, qu’il était rentré au pays, espérant une ouverture démocratique. Son retour, salué comme un pas vers la réconciliation politique, semble aujourd’hui compromis.

À l’approche des élections d’octobre, cette affaire judiciaire cristallise les inquiétudes des observateurs. Des organisations de la société civile, des ONG de défense des droits humains et des figures politiques tanzaniennes ont exprimé leur préoccupation quant à une possible répression de la dissidence. Le gouvernement, de son côté, insiste sur la légalité des poursuites et rejette toute velléité d’intimidation.

Le CHADEMA menace désormais de boycotter le scrutin si les conditions électorales ne sont pas réformées. Alors que la Tanzanie s’apprête à renouveler sa classe politique, le sort de Tundu Lissu pourrait bien devenir le symbole d’un choix crucial : ouverture démocratique ou retour à l’autoritarisme.

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