Vu d’Occident et même d’Afrique, c’est un lieu commun déjà ancien que de dire que » l’Afrique a de l’avenir « . D’autres continents n’en auraient-ils pas ? Dire que » l’Afrique a de l’avenir « , c’est un moyen commode de ne pas dire lequel. Esquisser des lendemains qui chanteront, c’est également moins fatigant que d’analyser un présent complexe.
Pour autant, toute l’analyse la plus lucide, la plus féconde, n’épuise pas la validité d’une grosse évidence : seul l’avenir a de l’avenir ! Mais avec cette précision : l’avenir débute tout de suite. Hop : à peine énoncé, déjà commencé ! La trajectoire prise aujourd’hui montre la destination de demain. En bref, si l’Afrique veut sortir de l’ornière, si elle veut étonner le monde au XXIème siècle, c’est maintenant qu’elle doit, elle-même, trouver sa voie – neuve, originale, crédible.
Les domaines où créer la différence ne manquent pas. Prenons le sport, par exemple. Voilà l’une des activités humaines les plus universellement aimées et pratiquées. Voilà l’un des vecteurs les plus sûrs des valeurs d’effort, de respect de l’autre, de probité. Or qu’observe-t-on ? La généralisation des jeux du cirque, la monétisation de la personne, le culte absurde des idoles d’un instant, la banalisation de la violence, de la haine et de la triche – cette dernière n’étant autre qu’une violence que l’on fait subir à la vérité.
Une autre approche est sûrement possible. Elle est à l’œuvre en Afrique plus qu’ailleurs, parce que l’argent y circule moins. Bien sûr, les exploits sportifs des compétiteurs africains sont utilisés pour détourner l’attention de leurs peuples des échecs des régimes en place. Mais quand une étoile du sport africain – un George Weah, une Zola Budd, un Haile Gebreselassie, un Saïd Aouïta – parvient au firmament de l’élite mondiale, elle fait retomber un peu de sa poussière sur le terrain et l’embellit.
Il faut espérer qu’à Sydney, en septembre, l’Afrique emporte le plus grand nombre possible de médailles. Non pas afin que les sportifs africains soient réévalués sur le marché des transferts et des sponsorings dorés. Mais plutôt pour que le monde entier regarde le continent d’un oeil nouveau, et qu’il commence à se dire que l’avenir du sport n’est pas dans les excès de l’argent-roi. En lui restituant un peu de sagesse, l’Afrique aura commencé de partager avec le monde une valeur d’avenir.