Sud Soudan : pourquoi la société civile exige la démission de Salva Kiir et Riek Machar ?


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Riek Machar et Salva Kiir
Salva Kiir (à droite) et Riek Machar (à gauche)

La société civile sud-soudanaise en a marre de la guerre, de l’insécurité quasi permanentes, et de la corruption endémique qui sévissent au Soudan du Sud, et qui font leur nid sur les sempiternelles rivalités entre les deux principaux dirigeants du pays : le Président Salva Kiir et le Vice-président Riek Machar. Elle appelle donc à leur départ.

Au Soudan du Sud, la société civile n’en peut plus du blocage que vit le pays depuis son indépendance en 2011. Dix ans après son émancipation du Soudan, le Soudan du Sud stagne, et est le plus clair du temps déchiré par des affrontements entre les camps de deux hommes que tout oppose : Salvar Kiir, le Président, et Riek Machar, le Vice-président. Conséquences de ces affrontements incessants entre les deux hommes, la population vit dans une pauvreté et une misère crasses : 82% de la population vivent sous le seuil de la pauvreté, selon les données de la Banque mondiale.

Le pays dispose pourtant de gisements non négligeables de pétrole, et bénéficie par ailleurs d’un important appui de la communauté internationale. Excédées, une dizaine d’organisations de la société civile composées d’universitaires, d’avocats, d’organisations de femmes et de jeunes, crient leur ras-le-bol et invitent ce lundi, la population sud-soudanaise à manifester dans tout le pays, pour demander la démission du Président et du Vice-président.

Salvar Kiir et Riek Machar, les deux bourreaux du Sud Soudan

Pour ces organisations de la société civile, les principaux maux dont souffrent le Soudan du Sud ont pour nom : la guerre, l’insécurité, la corruption, et tout ça sur fond de rivalités permanentes entre deux hommes : Salva Kiir et Riek Machar, respectivement, Président et Vice-président du Soudan du Sud. « Quand ils gouvernent ensemble, rien ne bouge. Ils ne sont d’accord sur rien. Et quand ils ne sont pas ensemble, ils se battent et sont responsables de souffrances, de destructions, et de nombreux décès de civils », laisse entendre Rajab Mohandis, de la Coalition du peuple pour l’action civile.

Et de poursuivre : « Plusieurs accords de paix ont été signés entre les deux hommes, à chaque fois, ils promettent de travailler ensemble, et à chaque fois, ces accords sont oubliés. Leur désaccord remonte à la guerre d’indépendance et continue jusqu’à aujourd’hui ».
Pour les responsables de la société civile, « le Président Salva Kiir a tellement peur d’être délogé, qu’il passe son temps à essayer de se maintenir au pouvoir au détriment du pays. En plus, tous deux sont conscients que des crimes contre l’humanité ont été perpétrés, et que le jour où ils ne sont plus au pouvoir, ils pourraient être traduits en justice. De nombreux Sud-Soudanais pourraient diriger ce pays bien mieux qu’eux. Il est temps de changer ; car nos leaders ont échoué et nous ne pouvons plus continuer ainsi ».

La solution idoine dont a besoin le pays, à en croire ces responsables, c’est que les deux hommes qui le dirigent se retirent purement et simplement du jeu pour un renouvellement de la classe politique dirigeante. C’est pourquoi, ils ont appelé à la manifestation de ce jour où le Président Salva Kiir devait prononcer une allocution à l’occasion de la séance d’ouverture du Parlement. Mais finalement, la manifestation n’a pas eu lieu. 

Rues entièrement désertes à Juba

Le constat, ce lundi, à Juba, à l’heure où nous mettons ce papier sous presse, ne trompe point. L’appel à manifester n’a pas reçu un écho favorable de la part de la population qui craint, sans doute, une répression violente par les forces de l’ordre. En effet, sur place, Internet a été coupé, et les forces de sécurité ont été déployées dans les rues. « Nous avons déployé les forces au moins pour maintenir l’ordre en cas de problème. Ces forces sont dans les rues pour votre sécurité », a déclaré le porte-parole de la police, qui a également précisé que les manifestants n’avaient pas reçu l’autorisation de manifester.

Pour l’activiste Jame David Kolok de la Fondation pour la démocratie et la gouvernance responsable, un des mouvements ayant appelé à la manifestation de ce lundi, la fermeture d’Internet était un signe que « les autorités paniquent ».

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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