À peine 9 ans d’existence en tant que nation souveraine, à la suite du référendum d’autodétermination organisé du 9 au 15 janvier 2011, le Soudan du Sud fait déjà face à la récurrente mal-gouvernance des autorités. Des politiciens et hauts fonctionnaires du jeune État auraient détourné au moins 36 millions de dollars (20,1 milliards FCFA) de fonds publics, parfois avec la connivence d’entreprises et de banques internationales, a déclaré une commission des Nations Unies.
Ce rapport de la Commission des droits de l’Homme des Nations Unies au Sud Soudan, est intervenu 6 jours après que le Président Salva Kiir a limogé le ministre des Finances du pays, le chef de l’autorité fiscale nationale, ainsi que le directeur de la compagnie pétrolière publique. « Notre Commission a découvert des détournements de fonds inqualifiables de la part de hauts responsables politiques et de fonctionnaires, ainsi que d’un certain nombre d’entités liées au gouvernement », a déclaré la présidente de la commission des Nations Unies, Yasmin Louise Sooka.
« Nous pouvons révéler le détournement de 36 millions de dollars, depuis 2016. Il convient de noter que c’est exactement ce que nous avons pu retracer et que cela ne reflète peut-être pas le tableau complet », a-t-elle ajouté. Yasmin Sooka a aussi fait savoir que le chiffre concerne les mouvements financiers illégaux du ministère des Finances et de la Planification économique et de la National Revenue Authority. « De façon choquante, ces organismes sud-soudanais ont été aidés et encouragés dans ces crimes par un certain nombre de sociétés internationales et de banques multinationales. Une partie de cet argent a été blanchie par l’achat de propriétés à l’étranger. En effet, ces propriétés pourraient bien se trouver dans vos pays ».
La commission, mise en place en 2016, avait précédemment accusé les politiciens du Sud Soudan d’empocher des fonds publics, mais le dernier rapport fournit ses accusations les plus détaillées à ce jour. Le Sud Soudan a du mal à faire face aux conséquences d’une guerre civile de 6 ans, qui a fait environ 380 000 morts et paralysé la production de pétrole brut, qui représente plus de 90% des recettes de l’État. « Le Soudan du Sud est un pays où des vies sont détruites par la corruption financière à une échelle épique» , a déploré Sooka.
« Le pillage et la corruption ne sont pas que des ramifications de la guerre, ils sont sans doute les principaux moteurs du conflit. À une extrémité du spectre, les élites politiques du Sud Soudan se battent pour le contrôle des ressources pétrolières et minérales du pays, en train de voler l’avenir de leur peuple. De l’autre, les soldats dans ce conflit sur les ressources se voient offrir la possibilité d’enlever et de violer des femmes en lieu et place de rançons. La fillette de 8 ans violée en groupe devant ses parents est le dommage collatéral », a-t-elle révélé.
À rappeler que le remaniement du 17 septembre dernier au ministère des Finances, à l’autorité fiscale et à la Nile Petroleum Corporation (NilePet), est intervenu après l’effondrement des réserves de devises du Sud Soudan, entraînant une baisse de 37% de la valeur de la livre sud-soudanaise par rapport au dollar américain.