Enfant, Souleymane se décrit comme rêveur et naïf. On retrouve l’empreinte de ce gamin dans les textes de son premier album « l’Univers Peul ». Le sens et la sonorité, le fond et la forme, vivent en parfaite harmonie sans se cannibaliser l’un l’autre. Les bons mots surprennent l’oreille mais font aussi cogiter. Et le slam prend un goût Peul.
Par Eugène Yobouet de notre partenaire Sphèremétisse
« Un Peul, sans ses proverbes et ses dictons risque d’être un peu perdu. Plutôt qu’être assis le cul entre deux chaises, mieux vaut être debout, en équilibre sur deux cultures ». Cet équilibre Souleymane Diamanka l’a bien trouvé entre les cultures Peule et occidentale. Sa musique est un parfait métissage de ces deux rencontres. Amoureux des mots, l’artiste de Bordeaux tient en ébullition la scène slam avec un premier album doux, poétique et surprenant, « l’univers peul ». Pour un coup d’essai, cette œuvre est un véritable coup de maître.
« Je ne m’attaque pas tout de suite à un thème quand j’en tiens un. J’ai plein de phrases qui se bousculent, mais j’attends vraiment le dernier moment pour voir physiquement, ce que cela sera sur le papier. Je laisse mûrir, avec les sentiments de la vie de tous les jours, j’emmagasine. Et quand cela déborde de mon cerveau ou de mon cœur, je pose tout cela sur le papier.» indique-t-il. Et il le chante aussi bien. La voix grave de Souleymane Diamanka rappelle celle d’un autre slammeur, Grand Corps Malade (en duo sur Au bout du 6e silence). La musique sur laquelle il pose ses mots est plutôt jazzy et intimiste, avec quelques accents africains pour « Je te salue vieux Sahara » ou « Moment d’humanité », qui convie le griot sénégalais Sana Seydi. Une heureuse coïncidence a réuni les deux hommes. Mais pour Souleymane, les deux cultures, les deux langues et les deux générations n’ont jamais été très éloignées.
Une enfance passée à Bordeaux
Parti de son Sénégal à l’âge de deux ans, Souleymane passe son enfance à Bordeaux. De la rencontre des mots avec la musique en banlieue, naît un groupe de hip hop, « Djangu Gandhal », dans lequel tous les membres rappent et dansent. Souleymane Diamanka écrit en outre tous les textes. Un goût de l’écriture que le jeune a gardé de son professeur qui lui répétait que «Écrire de la poésie, c’est faire des nœuds dans les phrases et obliger les gens à défaire ce nœud comme un papier cadeau ». La métaphore va germer dans la tête du gamin, qui va dès lors jongler avec les mots. La danse n’étant pas son truc, il joue d’abord à l’alchimiste des mots, avec le dictionnaire comme matière première, en faisant par exemple des additions de mots ou en s’imposant des contraintes d’écriture. Puis il fait la découverte miraculeuse des palindromes, et se met au défi d’en créer. « L’Univers Peul » est le fruit de ce grand défi. Une véritable traversée continentale dans le pays des songes et de la quête de soi.
« Amadou Hampaté Bâ disait : “En Afrique, un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle”. J’ai envie d’être cette passerelle entre ces deux univers apparemment lointains, mais contigus en réalité, et qui se prolongent. C’est pour ça que je parle d’oralité manuscrite. Pour moi, la poésie est dans la vie… Et puis il y a la poésie de ma maman qui me disait toujours : “Si quelqu’un te parle avec des flammes, réponds-lui avec de l’eau.” La poésie c’est ça !» Parole de Poète.
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