Soudan : Burhan contre Hemedti, deux généraux pour un pays en ruines


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Eléments armés au Darfour
Des éléments armés au Darfour (Soudan)

Deux ans après le déclenchement d’un conflit sanglant, le Soudan demeure l’un des foyers les plus meurtris d’Afrique. Une guerre ouverte entre l’armée nationale et les Forces de soutien rapide (FSR) plonge le pays dans un chaos profond.

À la clé : le contrôle du pouvoir, la survie d’un État, et des millions de vies suspendues entre deux feux. Mais qui sont réellement les protagonistes de ce conflit et quelles zones dominent-ils aujourd’hui ?

Deux hommes forts pour une seule nation

À l’origine de cette guerre, deux figures militaires : le général Abdel Fattah al-Burhan, à la tête de l’armée régulière, et le général Mohamed Hamdan Dagalo, alias « Hemedti », leader des Forces de soutien rapide. Ancien bras droit devenu rival, Hemedti tire ses forces d’une milice redoutée, les Janjaweed, tristement célèbre pour ses exactions au Darfour. L’alliance entre les deux hommes, née après la chute d’Omar el-Béchir en 2019, a rapidement volé en éclats sur fond de luttes d’influence, de refus d’une transition civile et d’ambitions personnelles démesurées.

Une guerre de territoires et de symboles

Le conflit a redessiné la carte du Soudan. Les FSR dominent aujourd’hui le Darfour, plusieurs zones du Kordofan et conservent encore une présence dans la capitale Khartoum, malgré les récentes avancées de l’armée. De son côté, l’armée contrôle le nord et l’est du pays, ainsi que des points stratégiques comme Port-Soudan sur la mer Rouge, le centre d’Omdurman, et plus récemment l’État de Gezira. En mars, la reprise du palais présidentiel par l’armée a marqué une victoire hautement symbolique, bien que la guerre reste loin d’être gagnée.

Le Darfour, de nouveau ravagé par les flammes

Le Darfour, théâtre d’un génocide au début des années 2000, replonge dans l’horreur. Accusées de ciblage ethnique, les FSR y imposent leur loi, multipliant les sièges et les massacres. El-Fasher, dernier bastion tenu par l’armée dans la région, est assiégée, ses hôpitaux débordés, ses civils piégés. Dans cette zone déjà meurtrie, les civils paient une fois de plus le prix le plus lourd.

À l’occasion du deuxième anniversaire de la guerre, Hemedti a posé un nouvel acte : la proclamation d’un gouvernement parallèle dans les zones sous contrôle des FSR, avec un « conseil présidentiel » censé représenter toutes les régions du Soudan. Cette manœuvre, largement perçue comme une tentative de légitimation politique, pourrait bien précipiter la partition du pays et ruiner les derniers espoirs d’unité nationale.

Une guerre oubliée du monde ?

Malgré l’ampleur de la catastrophe, 150 000 morts présumés, plus de 12 millions de déplacés, la guerre au Soudan demeure largement ignorée sur la scène internationale. Les appels de l’ONU, de l’Union africaine ou d’ONG comme Amnesty International peinent à provoquer une mobilisation à la hauteur du drame. Les efforts diplomatiques, comme ceux menés en Arabie saoudite ou au Bahreïn, se sont enlisés. La rivalité entre les généraux reste intacte, et aucune des deux parties ne semble prête à céder.

Le conflit soudanais n’est pas uniquement interne. Les FSR bénéficieraient de l’appui logistique de pays voisins comme la Libye, le Tchad ou le Sud-Soudan, tandis que les Émirats arabes unis sont soupçonnés de fournir armes et financement. L’armée, quant à elle, aurait reçu un appui technologique, notamment sous la forme de drones iraniens. Ces ingérences prolongent la guerre et en complexifient la résolution.

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