Le reporter français Gwenlaouen Le Gouil a été enlevé, dimanche matin, par des hommes armés à l’est de Bosasso, dans la région semi-autonome du Puntland, au nord de la Somalie. Des négociations avec les kidnappeurs sont actuellement en cours. Le journaliste qui travaillait pour la chaîne franco-allemande Arte s’était rendu à Bosasso dans le but de faire un reportage sur le trafic de migrants clandestins. Cette ville somalienne représente un point de convergence pour des dizaines de milliers de migrants qui cherchent à traverser le golfe d’Aden pour atteindre le Yémen.
Gwenlaouen Le Gouil, un journaliste reporter d’images de 32 ans a été kidnappé, dimanche matin, par trois hommes armés de fusils automatiques AK-47. Selon le témoignage du chauffeur du journaliste, l’enlèvement s’est produit à environ 70 km à l’est de Bosasso, principale ville du Puntland au nord de la Somalie. Les ravisseurs du journaliste ont demandé une rançon dont le montant restait ce lundi assez flou, on parle de 35 000 (24 415 euros) et 70 000 dollars (48 830 euros). Pour l’heure, les négociations entre les chefs coutumiers somaliens, les autorités françaises et les kidnappeurs sont en cours. « J’espère que le contact avec de possibles ravisseurs ne sera pas perdu et qu’il ne s’agira que d’une demande de rançon », a déclaré, dimanche à l’AFP le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner. Le « french Doctor » a précisé qu’il privilégiait la thèse d’un acte crapuleux sur celle d’un enlèvement politique.
Un reportage dangereux
Pour le secrétaire générale de Reporter sans frontières (RSF) Robert Ménard, même s’il s’agit « d’une simple histoire de racket », « le travail de Gwenlaouen Le Gouil a joué aussi » a t-il expliqué, lundi, à l’hebdomadaire français Le Nouvel Observateur. « Les passeurs sont exaspérés qu’un journaliste vienne enquêter sur leurs petites affaires », a ajouté M. Ménard à l’hebdomadaire. Le reporter était venu effectuer un reportage, pour la chaine franco-allemande Arte sur le trafic des migrants africains vers l’Arabie Saoudite via le Yémen. Gwenlaouen Le Gouil s’était rendu à Bosasso, le principal port de la région semi-autonome de Puntland, car cette ville représentait e point de convergence pour les migrants qui cherchent à traverser le golfe d’Aden pour rejoindre le Yémen.
Contre 50 à 70 dollars, les futurs candidats à l’exil, sous un soleil de plomb, s’entassent dans une embarcation de fortune où ils sont battus par les passeurs et jetés par-dessus bord à la moindre incartade, rapporte le Haut Commissariat des réfugiés. Ce trafic, alimenté par une mafia d’agents et de propriétaires de bateaux, génère au minimum trois millions de dollars par an, selon l’ONG Danish Refugee Council, interrogé par le journal La Provence. Plus de 27 000 personnes sont parvenues à se rendre au Yémen. Ce pays, qui est l’un des seuls Etats signataires de la convention de 1951 sur les réfugiés dans la région, « accorde systématiquement le statut de réfugié aux ressortissants somaliens qui fuient leurs pays » et en font la demande.
Une situation politique sous haute tension
Beaucoup de somaliens cherchent à quitter leur pays en proie à des affrontements entre les insurgés et les forces gouvernementales somaliennes et éthiopiennes depuis la mise en déroute de l’Union des tribunaux islamiques, fin décembre 2006. Selon l’ONU, plus de 600 000 habitants de Mogadiscio ont quitté la ville depuis le début de l’année en raison des combats.
Au vue de ce contexte politique tendu, la principale crainte reste les conditions de libération de Gwenlaouen Le Gouil. Interrogé par l’AFP, ce lundi, Jean Laurent Bodinier, l’un des cofondateurs de la société audiovisuelle Cargocult production du journaliste français, a appelé « le gouvernement du Puntland à ne pas utiliser la force pour libérer son collègue », ajoutant que « ce serait de son point de vue la pire des solutions ». Depuis le début de l’année, huit journalistes locaux ont été tués dans la région de Puntland.