Zamzam Abdinoor, une orpheline de 16 ans et mère célibataire de deux enfants, a déjà été mariée et faite veuve deux fois. Jawahir Farah, 17 ans, mère d’un enfant est la troisième épouse d’un milicien qui a disparu. Deux exemples parmi tant d’autres.
Zamzam Abdinoor a été donnée en mariage une première fois à un milicien de la ville portuaire de Kismayo. Son époux est décédé un an après leur mariage lors d’un des nombreux affrontements entre factions rivales somaliennes. Son oncle avait alors trouvé un autre milicien à qui elle a été donnée en mariage, mais son deuxième époux est lui aussi décédé de mort violente.
« J’étais effondrée et je m’étais jurée de ne plus jamais me remarier avec un milicien. J’étais dans un état de grossesse avancé et prête à accoucher », a expliqué la jeune Zamzam Abdinoor, qui vit actuellement dans le camp de réfugiés de la ville kenyane de Garissa, après avoir fui les combats entre les troupes gouvernementales somaliennes et les combattants de l’Union des tribunaux islamiques, au début de 2007.
« Même sans la présence d’un homme, je parviens à nourrir mes enfants et à leur acheter de beaux vêtements. Nos hommes sont mauvais », a affirmé Zamzam Abdinoor, qui vend aujourd’hui du thé, de la nourriture et du khat, une feuille contenant des substances hallucinogènes que mâchent beaucoup d’habitants des régions de la Corne de l’Afrique.
Jawahir Farah (un nom d’emprunt), 17 ans est devenue la troisième épouse d’un milicien. Mère d’un enfant, elle se retrouve seule aujourd’hui depuis que son mari a disparu pendants les combats intenses que se sont livrés les troupes éthiopiennes et les combattants de l’Union des tribunaux islamiques à Mogadiscio, au début de l’année 2007.
« Mes parents m’ont donnée en mariage à cet homme. C’était un combattant chargé de la collecte des taxes au marché aminé de Bakara (à Mogadiscio, la capitale), a confié à IRIN la jeune Jawahir Farah, son bébé de six mois attaché au dos. « Il était riche et j’étais heureuse de l’avoir épousé parce qu’il pouvait se permettre de tout acheter, des bijoux en or, de beaux vêtements et de la nourriture.
« Aujourd’hui, je suis incapable de dire s’il est en vie ou s’il est mort. J’ai reçu des témoignages contradictoires. Pour certains, il se cache quelque part, alors que d’autres pensent qu’il est mort », a-t-elle ajouté.
Les femmes, les plus vulnérables
Selon Abdirahman Yussuf Meygan, expert en résolution des conflits, les femmes et les enfants sont les personnes les plus vulnérables de la guerre civile qui déchire la Somalie. Ils constituent la majorité des réfugiés somaliens ayant fui vers les pays voisins, a-t-il précisé.
« Lorsque des miliciens décèdent, ils laissent derrière eux plusieurs veuves et orphelins. Certains ont parfois la chance de bénéficier d’une aide, mais d’autres sont tout simplement abandonnés et souffrent », a expliqué M. Meygan.
Pour Nemia Temporal, responsable du bureau du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés au camp de réfugiés de Dadaab, dans l’est du Kenya, l’agence a mis en place des programmes pour venir en aide aux femmes vulnérables et leur offre des services de protection et d’intégration, de conseils et d’aide au relogement.
« Les mères seules sont soit abandonnées soit séparées de leur époux et elles peuvent faire l’objet de harcèlement, de discrimination et d’agressions physiques », a déploré M. Temporal.
Abdia Sheikh, autre réfugiée et veuve victime du conflit somalien, a affirmé que les femmes se trouvant dans sa situation pouvaient se prendre en charge si on les aidait à créer un petit commerce.