Jeudi, le gouvernement de transition somalien appuyé par l’armée éthiopienne a pris Mogadiscio aux Tribunaux islamiques. Les chefs de guerre qui lui sont alliés ont immédiatement refait leur apparition dans la capitale. Mélès Zenawi, le Premier ministre éthiopien, assure que les islamistes n’ont pas les moyens de mener une guérilla et réclame l’envoi d’une force de maintien de la paix.
La puissance de feu de l’armée éthiopienne est sans commune mesure avec les capacités militaires des Tribunaux islamiques (UIC). Les observateurs de la situation en Somalie se demandaient néanmoins quelle pouvait être la portée des appels au jihad lancés par le Cheikh Sharif, le chef des islamistes, contre l’envahisseur chrétien. Finalement, il aura fallu une semaine au Gouvernement de transition (TFG) somalien, appuyé par le voisin éthiopien, pour conquérir « 95% du pays », selon son porte-parole, Abdirahman Dinari. La capitale, Mogadiscio, a été prise jeudi sans heurts.
Les affrontements ont fait 3000 morts côté islamistes, selon les autorités éthiopiennes, qui n’indiquent pas quelle est l’étendue de leurs pertes. Selon le Premier ministre éthiopien, Mélès Zenawi, qui s’est exprimé jeudi lors d’une conférence de presse, l’essentiel des miliciens de l’UIC ont retourné leur veste et ne seront pas pourchassés.
« Il n’y a pas de vacance du pouvoir »
Dès l’instant où les islamistes ont quitté la capitale, les milices des chefs de guerre, chassés en juin par les premiers, ont fait leur réapparition. Le TFG aurait contacté ceux de ces chefs qui lui sont alliés afin d’éviter des heurts lors de la prise de Mogadiscio, voire pour solliciter leur support. La milice du député Mohamed Furuh a ainsi investi le port de la capitale, rouvert en juin dernier par les Tribunaux. Pendant ce temps, les troupes fidèles à Mohammed Dehere, un proche du Premier ministre Mohammed Ghedi, ont fait main basse sur la Villa Somalia, l’ancien palais présidentiel, indique l’envoyé spécial de Libération.
Les différents clans se sont jetés sur l’armement abandonné dans leur fuite par les islamistes. Le partage inégal a d’ailleurs donné lieu à des affrontements. Cité par l’agence de presse éthiopienne ENI, Mélès Zenawi a affirmé que des armes ont délibérément été distribuées à des adolescents afin de provoquer le chaos dans Mogadiscio. Mais dès jeudi, Abdirahman Dinari, le porte-parole du TFG, a assuré qu’« il n’y a pas de vacance du pouvoir. Ce matin, les milices s’étaient engagées dans des opérations de pillage, mais nous avons restauré le calme (…) Ce n’est pas seulement le Premier ministre mais tout le gouvernement, tous les ministres, les députés ainsi que les ministres délégués [qui] iront à Mogadiscio pour organiser la population », a-t-il expliqué à la Panapress.
Besoin d’une force de maintien de la paix
En demandant jeudi à ses moudjahidin « de ne plus se battre pour éviter un bain de sang », le chef de l’UIC a assuré qu’il s’agissait là d’un repli « tactique » et que son mouvement poursuivrait le combat. Mais le Premier ministre éthiopien garantit qu’il n’y a aucun risque à voir les Triunaux se lancer dans une guérilla dans la mesure où « ils ne bénéficient pas d’un soutien massif en Somalie ».
Il a expliqué que la mission de l’armée éthiopienne a été accomplie à 75% et que cette dernière resterait quelques semaines en Somalie pour mettre en déroute les Shebab, l’aile radicale des islamistes et des djihadistes étrangers. Ces derniers auraient pris la fuite vers le port de Kismaayo, au sud du pays. Mélès Zenawi a insisté sur l’incapacité de son pays à répondre aux besoins du TFG et a appelé la communauté internationale à le soutenir. Il a précisé que ces besoins concernaient une aide humanitaire d’urgence et une force de maintien de la paix.
Justement, le 6 décembre dernier, le Conseil de sécurité de l’ONU a autorisé l’envoi d’une mission africaine de « protection et de formation » en Somalie forte de 8 000 hommes. Ces derniers auraient été fournis par l’Autorité intergouvernementale de développement (Igad), composée du Kenya, de l’Ouganda, du Soudan, de Djibouti, de l’Ethiopie, de l’Erythrée et du TFG. L’Ouganda, qui s’était porté candidat à l’envoi de troupes, s’était rétracté devant le risque trop élevé à la veille des affrontements.