Des chefs de guerre de Mogadiscio ont accepté vendredi de déposer les armes et d’intégrer les forces de sécurité du gouvernement de transition. Mais la question du déploiement d’une force de paix africaine en Somalie reste sans réponse. Tout comme la polémique sur le nombre de victimes du raid aérien américain effectué lundi dans le sud du pays.
Si l’accord est confirmé, puis appliqué, le président Abdullahi Yusuf Ahmed a marqué des points, vendredi, en recevant à sa résidence, la Villa Somalia, des chefs de milices de Mogadiscio. Selon son porte-parole, Abdirahman Dinari, « les principaux chefs de guerre qui contrôlaient une partie de la capitale somalienne ont décidé de rendre leurs armes au gouvernement fédéral de transition (TFG) après quatre heures de discussions ». Selon lui, ils « ont aussi accepté d’ordonner à leurs miliciens de rejoindre l’armée nationale ».
Fort de ces ralliements, le président somalien pourrait ramener le calme dans la capitale somalienne et éviter que sa population ne regrette trop longtemps les tribunaux islamiques (UIC). Ces derniers avaient réussi en juin 2006 à mater les chefs de guerre et à mettre fin au chaos qui régnait dans Mogadiscio. Vendredi, alors que l’entrevue se tenait, des heurts devant la Villa Somalia entre les forces gouvernementales et les milices de deux chefs de guerre ont ainsi eu lieu, faisant deux morts, selon Abdirahman Dinari.
Près de 70 morts selon Oxfam
Plus au sud, à la frontière kenyane, la question du nombre de victimes du bombardement américain réalisé lundi reste entière. Selon les autorités américaines, l’AC 130 a décollé de sa base de Djibouti pour attaquer les islamistes qui auraient trouvé refuge dans le sud de la Somalie. Parmi eux auraient figuré le Comorien Fazul Abdullah Mohammed, le Kenyan Saleh Ali Saleh Nabhan et le Soudanais Abu Talha al-Sudani, présumés responsables des attentats de 1998 contre les ambassades américaines de Tanzanie et du Kenya (224 morts).
Un haut responsable américain a indiqué qu’ils avaient échappé à l’attaque. Il a ajouté que « 8 à 10 » personnes liées au mouvement islamiste ont été tuées et qu’aucun civil n’a trouvé la mort dans le seul bombardement aérien revendiqué par les Etats-Unis. Des chefs coutumiers somaliens des districts de Dhobley et Afmadow ont pourtant fait état jeudi d’au moins 100 morts parmi les civils. Vendredi, les organisations partenaires en Somalie de l’ONG Oxfam ont recensé 70 morts après le raid aérien.
Selon le Washington Post daté de vendredi, une équipe de militaires américains s’est rendue sur le lieu du bombardement afin d’établir un bilan précis. Ce serait la première fois depuis la médiatisée opération Restore Hope de 1994 que des forces américaines mettent les pieds en Somalie.
Ne pas légitimer la « guerre contre la terreur » américaine
Vendredi, l’ambassadeur américain au Kenya et en Somalie, Michael Ranneberger, a réclamé le déploiement rapide d’une « force de stabilisation africaine en Somalie (…) pour soutenir les efforts en vue de rétablir la stabilité ». Le Conseil de sécurité de l’ONU a accepté le 6 décembre dernier le déploiement d’une telle force. L’essentiel des 8 000 hommes prévus devait être fourni par l’Igad (Autorité intergouvernementale pour le développement), composée du Kenya, de l’Ouganda, du Soudan, de Djibouti, de l’Ethiopie, de l’Erythrée et du TFG. L’Ouganda a dans un premier temps annoncé sa volonté d’y contribuer à hauteur de 1 500 hommes, avant que la situation ne se tende.
Vendredi, un diplomate sud-africain cité sous le sceau de l’anonymat par Reuters se montrait réservé sur l’opportunité d’envoyer des troupes en Somalie pour y remplacer l’armée éthiopienne : « Pour nous, envoyer des troupes signifierait mettre les pieds dans un marécage. Notre intervention serait perçue comme une participation à la « guerre contre la terreur » menée par les Etats-Unis. N’importe quelle force de paix y perdrait sa crédibilité. »