Paludisme, diarrhée, vomissements, pneumonie, bronchite et autres infections respiratoires, infestations vermineuses, gale, abcès, plaies et furoncles sont toutes des maladies fréquentes dans la communauté de Kroo Bay, située à Freetown, capitale de la Sierra Leone. Dès lors, il n’est pas étonnant que l’espérance de vie moyenne des 6 000 habitants du bidonville soit de 35 ans, a affirmé Amadou Kandor, responsable sanitaire local.
Kroo Bay, l’un des quartiers les plus pauvres du centre de Freetown, capitale côtière du Sierra Leone, est un bidonville sordide. Le sol y est à tel point jonché de déchets que les chemins sont faits de plastiques, canettes et tubes de dentifrice compressés, et rares sont les parcelles de terre ocre encore visibles.
Des nuées de moustiques se reproduisent dans des bassins à l’eau verte et poisseuse, tandis que cochons et enfants ont pour terrain de jeu commun des amoncellements de déchets. Dans l’une des deux rivières qui traverse les abris surpeuplés, faits de métal et de bois, un cadavre de chien bouffi flotte à la surface, juste en amont du lieu où les habitants lavent leurs vêtements.
L’espérance de vie à Kroo Bay, effroyablement basse, est même inférieure à l’espérance de vie moyenne en Sierra Leone, qui est de 45 ans ; un critère majeur qui explique le classement du pays au dernier rang dans le rapport annuel sur le développement humain élaboré par le Programme des Nations Unies pour le développement.
Le bidonville de Kroo Bay abrite les 6 000 habitants les plus pauvres du pays le plus pauvre du monde. Lorsqu’il pleut, les abris sont inondés d’eaux usées et de déchets
Save the Children, une organisation non gouvernementale (ONG) britannique, a initié un projet à Kroo Bay en 2007 afin de tâcher de répondre aux besoins de la communauté en matière de santé, de protection de l’enfance et d’éducation.
Selon Dineke van der Wijk, directrice nationale, lorsque la santé est en jeu, il est nécessaire de s’attaquer non seulement aux causes des maladies, mais également à leurs symptômes.
« Nous avons rapidement découvert que cette zone était inondable et que nombre de personnes étaient exposées à des risques, car deux rivières s’y rejoignent », a expliqué Mme van der Wijk.
Il pleut six mois sur 12 à Freetown, qui compte parmi les villes les plus humides au monde. Kroo Bay se situe au pied de la colline abrupte sur laquelle la ville a été bâtie.
Les habitants de Kroo Bay ont appris à s’adapter aux inondations constantes, en construisant par exemple leurs lits sur pilotis, une pratique qui leur impose de dormir au-dessus d’une eau putride, et génère des infections respiratoires.
« Il est inutile de se concentrer uniquement sur les symptômes du problème », a dit Mme van der Wijk. « Nous devons également traiter la cause de l’insalubrité, soit, dans le cas présent, les inondations ».
Certaines ONG ont initié des projets temporaires pour tenter de limiter les inondations et leurs répercussions sanitaires les plus graves, mais le gouvernement et les bailleurs de fonds doivent identifier des solutions à long terme
Save the Children a alloué des fonds destinés à renforcer les rives des fleuves avec des sacs de sable, nettoyer la communauté de ses déchets, et dispenser une formation axée sur la santé et l’hygiène à ses habitants. L’ONG a également construit des allées en bois afin que tous puissent se déplacer autour du bidonville sans devoir marcher dans l’eau sale.
L’organisation a par ailleurs financé la création des Volontaires de la croix bleue (Blue Cross Volunteers), des jeunes qui dispensent des premiers soins, distribuent des sels de réhydratation pour le traitement de la diarrhée et identifient et traitent les cas de choléra.
Le travail réalisé par l’ONG n’est pas une solution à long terme au problème de Kroo Bay. « Nous ne serons pas là chaque année pour mener ces mêmes actions », a expliqué Mme van der Wijk.
« C’est un problème complexe, mais les bailleurs de fonds de plus grande envergure qui tentent de résoudre le problème de l’eau et de l’assainissement doivent trouver une solution aux problèmes des communautés marginalisées telles que celle-ci. »
Les habitants de Kroo Bay, confrontés à quelques mois de pluie supplémentaires cette année, apprécient néanmoins ce que l’ONG a fait pour eux. « Il est vital de contrôler les inondations ici », a déclaré M. Kandor, le responsable sanitaire.