Pour la première fois, un projet de vaccin parvient à réduire significativement les risques d’infection. Le relatif succès d’un test en Thaïlande relance l’espoir de concevoir un jour un moyen de lutte efficace contre le virus du SIDA. Mais l’avenir est loin d’être assuré, et le mot d’ordre reste la prudence.
Tout espoir semblait disparaître pour la communauté scientifique. Celle-ci doutait de la possibilité de trouver un vaccin contre le SIDA, depuis l’échec inexpliqué chez Merck d’un test de vaccin en 2007. L’année dernière, Roche avait même annoncé se concentrer désormais sur les traitements existants. Les résultats d’une étude menée en Thaïlande, présentés jeudi, ont donc en partie rassuré les chercheurs. Le résultat, historique, est d’avoir réussi à diminuer de près d’un tiers les risques d’infection.
Laure Darcel, chargée de communication pour l’armée américaine, qui s’occupe du projet avec le ministère thaïlandais de la Santé, entend ne pas créer de faux espoirs, alors que le VIH a depuis sa découverte dans les années 1980 causé la mort de 25 millions de personnes selon l’ONU. Elle précise qu’« il faudra de longues années de recherche avant un vaccin grand public ». On est loin de la déclaration du chercheur américain Robert Gallo, dans le Midi libre ce mardi, qui déclarait croire à la possibilité d’un vaccin « dans un délai de 6 à 10 ans ». Ce dernier participe à l’un des 18 autres projets de vaccin, et est principalement financé par la fondation Bill Gates.
La conjonction de deux vaccins
Pour la première fois depuis la découverte du virus, les scientifiques disposent d’une preuve statistique de l’efficacité préventive d’un vaccin. L’OMS et ONUSIDA se sont prudemment réjouis des résultats de l’étude, menée en Thaïlande pendant trois ans. 16 000 personnes, âgées de 18 à 30 ans et séronégatives, ont été divisées en deux groupes test. Le premier a reçu une dose de vaccin tous les six mois. Le second s’est fait injecter un placebo au même intervalle de temps. A l’échéance du test, le groupe vacciné comprenait 31,1% de cas de séropositivité de moins que le groupe placebo, soit 51 infections contre 74.
Le traitement constitue en fait en la conjonction de deux vaccins, dont les essais avaient individuellement échoué. Les volontaires se sont vus au total administrer quatre doses d’ALVAC (Sanofi Pasteur), censées déclencher les réactions des défenses immunitaires, et deux doses d’AIDSVAX (VaxGen), censées renforcer celles-ci. La conjonction des deux se révèlerait donc être une bonne intuition, malgré un effet encore modeste.
Principal regret de l’équipe de recherche : le vaccin n’a aucun effet sur la quantité de VIH dans le sang. L’effet est donc pour le moment uniquement préventif. Une autre question préoccupante est celle de la transposabilité du vaccin hors de la zone Asie, en particulier pour la souche africaine du virus. Reste enfin un enjeu important : cette découverte aura-t-elle un effet sur le volume du financement international de la recherche, passé de 930 millions de dollars en 2007 à 870 millions en 2008 ?
Voir aussi :
un reportage de Voice of America sur l’état de la recherche (en anglais simplifié) :
Lire aussi :
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