C’est la psychose à Thiawlène. Le sommeil des habitants de ce quartier de Rufisque, une localité de la banlieue dakaroise, est troublé par l’avancée de la mer.
« Si je dispose de moyens financiers importants, je quitterai cet endroit pour aller vivre ailleurs ». Ces propos de Kébé, un natif de Thiawlène traduisent à suffisance la psychose dans laquelle vivent les habitants de ce quartier de Rufisque, une ville située 25 kms de Dakar.
Ici cet endroit est petit à petit englouti sous l’effet dévastateur des vagues. En cet après-midi de janvier, la mer semble calme et paisible à Thiawlène. Et pourtant ses habitants portent encore les stigmates de la submersion par les eaux du cimetière en 2007.
La moitié du cimetière a été détruite par l’océan. « Regardez, ici il y avait des hôtels, une usine et des terrains de football. Mais aujourd’hui tout a disparu », se désole Kébé. Cinq après, les débris du mur de protection du cimetière qui a cédé face à la furie des vagues, sont toujours visibles. En revanche la digue de protection contre l’érosion côtière a été restaurée par le génie militaire. Mais cette action ne rassure pas pour autant la population. Celle-ci continue de vivre dans la psychose d’une nouvelle invasion des eaux marines.
Apeurés, attristés et impuissants les habitants de cette localité de la banlieue dakaroise sont sans voix devant un tel spectacle. Dans la zone de Rufisque l’avancée de la mer est sans commentaire. Environ 600 mètres en vingt ans. Aujourd’hui les maisons sont à moins de 100 mètres de l’océan. Des églises, des mosquées et des nombreuses habitations ont été englouties par la mer. Déplaçant du coup des milliers de personnes qui ont été recasées dans d’autres localités.
« Face à l’avancée de la mer, la seule chose qui reste pour nous est de migrer vers des endroits tranquilles », avance Moussa Fall, un pêcheur de Thiawlène. Cet homme mince, teint noir d’une quarantaine d’année avoue son impuissance ainsi que celle de la population. « On s’en remet aux autorités. Elles doivent prendre des mesures idoines afin de protéger nos maisons », soutient-il.
Si les changements climatiques sont désignés du doigt comme responsables des agressions que subissent les zones côtières, l’action de l’homme n’est pas négligeable. Le prélèvement de sable marin, ainsi que les constructions sur le domaine public maritime contribuent également, pour une large part, à la modification de la côte. Il faut noter aussi que l’occupation anarchique du littoral a accentué le phénomène de l’érosion côtière. En effet des établissements hôteliers installent anarchiquement des épis qui sont des espèces de branches qu’on construit à partir de la côte vers la mer. Cela pour créer un ensablement.
Pour se protéger contre l’érosion côtière, Les structures privées créent aussi les brises lames, qui sont des infrastructures parallèles à la côte et qui sont l’intérieur de la mer. Elles peuvent être à certains endroits immergés. L’installation des brise lames a créé un fort ensablement d’un côté et une forte érosion côtière de l’autre côté surtout au niveau de la petite côte.
Face à ce drame, les autorités sénégalaises tentent d’apporter un début de solutions : « Au niveau de Rufisque on va procéder à l’installation de la digue frontale un ouvrage plus proche des rivages de 730 mètres et qui va couter environ 3.800.000.000 F CFA », note Aida Gueye Diongue assistante au coordinateur du projet d’adaptation à l’érosioncôtière dans les zones vulnérables du Sénégal. Par ailleurs une promenade sera aménagée avec des espaces verts.Des canaux seront aussi assainis afin de mieux évacuer les eaux usées.
Pour faire aussi face à la dégradation des côtes sénégalaises, Ernest Dionele coordinateur du projet d’adaptation à l’érosion côtière dans les zones vulnérables du Sénégal, envisage la gouvernance de littoral en élaborant une loi pour sanctionner certains comportements notamment l’occupation anarchique du domaine maritime.