Le début de la campagne électorale a-t-il sonné le glas des espoirs du mouvement du 23 juin ? Terriblement divisé, le M23 est à un tournant.
Depuis le rassemblement du 31 janvier, où environ 10.000 Sénégalais s’étaient massés place de l’Obélisque pour réclamer le retrait de la candidature d’Abdoulaye Wade, le M23 peine à mobiliser. Le lancement de la campagne électorale aurait-il signé la fin du mouvement du 23 juin, rassemblement hétéroclite d’organisations de la société civile, de mouvements citoyens et de partis politiques ?
Depuis quelques jours, les divisions au sein du mouvement apparaissent au grand jour. Les principaux candidats de l’opposition ainsi que le chanteur Yousou Ndour, dont le dossier a été rejeté par le Conseil constitutionnel, s’étaient engagés à la veille de la campagne à « rester unis » et à faire « front commun » jusqu’à ce que le chef de l’Etat renonce à briguer un troisième mandat. Mais, l’unité de façade affichée par les ténors de l’opposition n’a pas tardé à se fissurer. L’absence de Macky Sall, candidat de l’Alliance pour la République (APR), lors des dernières manifestations du M23 fait désordre. L’ancien Premier ministre préfère sillonner le pays en solo. « Les élections ont commencé, la campagne électorale aussi. Celui qui ne veut pas battre campagne, c’est son problème », répond Macky Sall à ses détracteurs dans les colonnes de Walfadjri. « Le combat pour le départ de Wade se mène dans le cadre du M23, mais aussi sur le terrain », justifie-t-il.
« Un sentiment de malaise »
« Le risque de division existe », constate Abdoul Aziz Diop, porte-parole du mouvement, qui évoque un « sentiment de malaise » au sein du M23. Le mouvement entend « réaffirmer » les principes pour lesquels il se bat : la défense de la constitution, l’impossibilité d’une succession arrangée et la tenue d’élections libres et transparentes. Aussi, Abdoul Aziz Diop « encourage les candidats à garder le cap ». « C’est dans une dynamique unitaire adossée au soutien du peuple que l’on pourra barrer la route au coup d’Etat constitutionnel d’Abdoulaye Wade », souligne-t-il. Pas sûr que les hommes politiques l’entendent. « Ils ne jouent pas le jeu », constate amer un autre membre du M23.
« L’esprit originel du M23 souffre beaucoup des enjeux électoralistes et des agendas des politiques », observe également Fadel Barro, coordonnateur de Y en a marre, pour qui il est temps de « raviver la flamme ». Déçu par la tournure des évènements, le mouvement ne participe plus aux rassemblements du M23 depuis le début de la campagne électorale. « Nous n’accepterons plus que les manifestations du M23 servent de meeting, affirme Fadel Barro. Le M23 n’est pas un mouvement politique et ne peut pas servir de tremplin à certains pour faire une campagne déguisée. » C’est pourquoi Y en a marre appelle à un « grand rassemblement citoyen et non-violent » samedi et dimanche après-midi à la place de l’Obélisque, lieu symbolique de la contestation. À deux semaines du premier tour de l’élection présidentielle, ce sera sans doute la dernière chance pour le M23.
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