
Le Fonds monétaire international (FMI) a alerté le Sénégal sur une dette cachée de 7 milliards de dollars accumulée entre 2019 et 2024. Ce montant a été dissimulé par les autorités de l’ancien Président Macky Sall, ce qui a confirmé les conclusions de la Cour des comptes sénégalaise. Selon le FMI, cette dette « cachée » représente une sous-évaluation volontaire, et elle a contribué à fausser les chiffres officiels de la dette publique. Cette situation a des conséquences graves sur la situation économique du pays, notamment sur ses relations avec le FMI et la soutenabilité de sa dette.
Une gestion des finances publiques controversée
Le rapport du FMI confirme ce qui avait été révélé par la Cour des comptes en février 2025. Selon cette dernière, la dette publique du Sénégal, qui était officiellement estimée à plus de 70% du produit intérieur brut (PIB), s’élève en réalité à près de 100% du PIB. Cette sous-estimation de la dette a permis au gouvernement de présenter une situation financière plus saine qu’elle ne l’était réellement. En camouflant cette dette, les autorités ont pu emprunter davantage sur les marchés financiers à des taux plus favorables, tout en envoyant un signal positif aux investisseurs.
Le chef de la délégation du FMI, Eddy Gemayel, a précisé que cette manœuvre permettait au Sénégal de s’endetter davantage tout en bénéficiant de conditions de financement plus avantageuses. Cependant, cette pratique a creusé un déficit public important. Ce qui a conduit à la suspension d’un programme de prêt du FMI d’un montant de 1,8 milliard d’euros. Ce prêt, qui visait à soutenir l’économie sénégalaise, ne pourra être débloqué qu’une fois que les autorités sénégalaises auront pris des mesures pour identifier les mécanismes qui ont permis de dissimuler la réalité de la dette.
Une situation économique fragile
L’une des conséquences directes de cette dette cachée est la suspension de l’aide du FMI, un coup dur pour l’économie sénégalaise. Le gouvernement est appelé à prendre des mesures correctives, comme la centralisation des entités en charge de la gestion de la dette et la mise en place d’un compte unique pour le trésor public, afin de restaurer la confiance des créanciers et des institutions financières internationales. Le FMI a averti qu’il faudrait un réajustement significatif pour éviter qu’une telle situation ne se reproduise à l’avenir.
En parallèle, l’agence de notation Standard & Poor’s (S&P) a exprimé des doutes sur la capacité du Sénégal à redresser rapidement sa situation économique. Les intérêts de la dette atteindront 20% des recettes de l’État en 2025, contre 14% l’année précédente. Cette augmentation des charges liées à la dette publique pourrait nuire à la croissance économique du pays, malgré les perspectives prometteuses liées à l’exploitation des champs pétroliers et gaziers.
Le plan du gouvernement sénégalais
Face à ces révélations, le gouvernement sénégalais, dirigé par le Premier ministre Ousmane Sonko, a présenté un plan visant à réduire les déficits budgétaires à 3% du PIB d’ici 2027. Cependant, cet ajustement reste un défi de taille, d’autant plus que le pays doit jongler avec des incertitudes économiques, notamment la dynamique de la croissance liée aux ressources naturelles. Le gouvernement envisage également une seconde phase de réduction des prix des produits de première nécessité, comme il l’a fait quelques mois après l’arrivée au pouvoir du Pastef, le parti de Sonko.
Le Premier ministre a exprimé de vives critiques à l’égard de la gestion des finances sous l’administration de Macky Sall. Lors d’une séance de questions au gouvernement, il a qualifié le rapport de la Cour des comptes de « catastrophe » et a souligné qu’il était nécessaire pour le pays de « se ressaisir ». Cependant, cette position n’a pas manqué de provoquer des réactions dans l’opposition, qui a remis en question la crédibilité du rapport et de la gestion actuelle.
Équilibre entre réduction des déficits et maintien de la croissance
Le débat autour de la gestion de la dette a également pris une dimension politique. L’opposition sénégalaise a vivement réagi à l’annonce de la dette cachée, certains députés critiquant le gouvernement pour son manque de transparence et son incapacité à assumer la gestion des finances publiques. Les tensions politiques se sont intensifiées, notamment après les révélations du rapport de la Cour des comptes, qui ont mis en lumière des erreurs de gestion et des irrégularités dans la comptabilité publique.
Le Premier ministre Sonko a insisté sur la nécessité de faire face à cette réalité et d’adopter des mesures qui permettent au Sénégal de rétablir sa crédibilité économique et financière. Cependant, il a rejeté l’idée de recourir à des mesures d’austérité drastiques. Le chef du gouvernement a insisté que le pays devait trouver un équilibre entre la réduction des déficits et le maintien de la croissance économique.