Ce mercredi, Karim Wade, poursuivi pour enrichissement illicite, et ses avocats étaient toujours absents des audiences au Palais de justice de Dakar. Cela fait désormais plus d’un mois que le fils de l’ancien Président sénégalais Abdoulaye Wade boude son procès, dénonçant une atteinte à ses droits et ceux de la défense.
Pas de violence ou d’insultes à tout va entre pro et anti-Karim Wade. L’atmosphère est désormais plus détendue au Palais de justice de Dakar. Ce mercredi en effet, on est loin des débuts du procès de Karim Wade, où les forces de l’ordre et de sécurité encerclaient toute la zone, guettant le moindre mouvement suspect. Bagarres, insultes, étaient quotidiens au procès du fils de l’ancien Président Abdoulaye Wade, jugé pour enrichissement illicite depuis le 31 juillet.
Le climat explosif des débuts qui tenait en haleine la presse sénégalaise est en effet bien retombé. Les salles d’audiences, auparavant pleines à craquer, se sont peu à peu vidées. Depuis que Karim Wade a décidé de boycotter les audiences après avoir été tabassé, ses partisans qui les remplissaient ont fait de même. Les journalistes, qui étaient nombreux à couvrir ce qu’ils appellent le « procès du siècle » au pays de la Téranga, sont aussi beaucoup moins nombreux maintenant. Désormais, plus besoin de faire une queue interminable pour rentrer dans la salle numéro 4 du Palais de justice. Même les membres des forces de sécurité sont plus détendus.
De son côté, la Cour de répression de l’Enrichissement illicite (CREI) poursuit le procès malgré l’absence de l’accusé et de ses conseils. Les avocats de ses co-accusés ont été au fur et à mesure appelés à prendre la défense de leurs clients accusés de complicité avec le fils de l’ancien Président Abdoulaye Wade. C’est le cas notamment d’Alioune Samba Diassé, l’un des responsables de la société ABS sa, soupçonné d’avoir eu des liens financiers avec Karim Wade. Selon l’avocat du prévenu emprisonné aussi dans la prison de Rebeuss, maître Samba Ametti, « il n’y a aucun lien direct, ni financier, ni personnel » entre son client et l’ancien ministre de Me Wade, soulignant que lorsque son client a créé la société en 1989, il ne connaissait pas Karim Wade.
Coup de théâtre sur coup de théâtre!
Après la longue plaidoirie de son avocat, le juge Grégoire Diop appelle à la barre Alioune Samba Diassé pour lui demander s’il souhaite ajouter quelque chose après l’argumentaire de son conseil. D’une voie faible, rocailleuse, ce dernier affirme faire confiance à la justice de son pays et s’en remettre à Dieu : « Je suis innocent. J’ai construit ma maison en 1989, je ne connaissais pas Karim à ce moment-là. J’ai travaillé durant trente ans. Je me suis fait moi-même, je n’ai jamais eu besoin de m’associer à qui que se soit. Je suis malade, c’est pour cela que ma voix est faible. La seule chose à laquelle je pense en ce moment, c’est de me faire soigner pour retrouver la santé ».
Depuis son ouverture le 31 juillet 2014, le procès tourne en rond, d’autant que ni le principal accusé ni ses avocats n’ont annoncé leur intention de revenir participer aux audiences. Une situation sur laquelle la CREI ferme les yeux de son côté, accélérant les choses avec l’annonce du parquet qui a réclamé, mardi soir, sept ans de prison ferme contre Karim Wade et 250 milliards de CFA d’amende. Ce qui devrait booster la cadence d’un procès émaillé de méli-mélo au point de lasser. Affrontements entre militants, insultes, altercations entre avocats, ont régulièrement eu lieu, entraînant la suspension systématique des audiences. Karim Wade fut même tabassé par ses gardes pénitentiaires lors d’une audience très tendue mi-janvier. C’est d’ailleurs à partir de là qu’il a décidé de boycotter son procès, observant une grève de la faim, avant d’y mettre fin quelques jours après, sur demande de son guide religieux.
Tant de situations qui poussent de nombreux observateurs du pays de la Téranga à parler d’une « parodie judiciaire » depuis le début du procès. Décidément on aura tout vu au procès de Karim Wade !