
L’heure des comptes a sonné au Sénégal. Deux anciens ministres de Macky Sall, Abdoulaye Diouf Sarr et Mansour Faye, sont visés par une procédure judiciaire pour leur gestion controversée des fonds anti-Covid. Dans un climat de rupture avec l’ancien régime, la justice sénégalaise semble décidée à ne plus laisser l’impunité prévaloir.
Au Sénégal, l’alternance politique initiée en 2024 semble inaugurer une nouvelle ère de reddition des comptes. Deux anciens piliers du régime de Macky Sall, Abdoulaye Diouf Sarr et Mansour Faye, sont aujourd’hui rattrapés par la justice. Accusés de mauvaise gestion des fonds destinés à la lutte contre la pandémie de Covid-19, ils pourraient prochainement être jugés par la Haute Cour de justice.
Des accusations lourdes portées par un rapport explosif
Le nom d’Abdoulaye Diouf Sarr, ex-ministre de la Santé, et celui de Mansour Faye, ancien ministre du Développement communautaire et beau-frère de l’ex-président Macky Sall, étaient déjà pointés du doigt dans le rapport de la Cour des comptes publié en décembre 2022. Ce document mettait au jour une gestion pour le moins opaque des fonds mobilisés dans l’urgence pour faire face à la pandémie. Absence de traçabilité, marchés passés sans appel d’offres, surfacturations et dépenses jugées injustifiées : autant de manquements graves que la justice sénégalaise semble aujourd’hui décidée à ne plus ignorer.
Longtemps resté lettre morte, le rapport de la Cour des comptes refait surface dans un tout autre contexte. La victoire de Bassirou Diomaye Faye et l’installation de nouvelles autorités plus enclines à l’assainissement de la vie publique ont ravivé la volonté de juger les responsables. La commission des Lois de l’Assemblée nationale s’apprête à engager la procédure de mise en accusation, qui pourrait déboucher sur un procès devant la Haute Cour de justice. Une juridiction rarement utilisée, mais compétente pour juger les anciens membres du gouvernement pour des faits commis durant leur mandat.
Une affaire symptomatique d’une gouvernance en crise
L’affaire va bien au-delà de deux anciens ministres. Selon les dernières informations, plusieurs arrestations ont déjà eu lieu dans l’entourage administratif et économique de l’ancien pouvoir. Des responsables associatifs, des opérateurs économiques et même des personnalités du monde artistique sont soupçonnés d’avoir participé à un système de détournement et de favoritisme. La justice sénégalaise semble désormais déterminée à remonter toute la chaîne des responsabilités, dans un contexte où la population exige davantage de transparence et de justice.
Cette série d’initiatives judiciaires marque une rupture. Pour beaucoup, il ne s’agit pas seulement de solder les comptes du passé, mais bien d’instaurer un nouveau paradigme de gestion publique. La promesse d’une gouvernance exemplaire faite par le nouveau pouvoir commence à se traduire dans les faits. Mais le véritable test résidera dans la capacité des institutions à aller jusqu’au bout de ces procédures, sans céder aux pressions politiques ou aux jeux d’influence. Car pour les Sénégalais, l’impunité ne peut plus être la norme.