À quelques jours des élections législatives, des personnalités de l’opposition rejoignent le Pastef, soulevant des interrogations sur la cohésion politique et l’intégrité du parti.
Des personnalités influentes, de l’ancien camp du président Macky Sall, rejoignent aujourd’hui les rangs du parti au pouvoir, le Pastef, dirigé par le Premier ministre Ousmane Sonko. Parmi les derniers transfuges, Adji Mbergane Kanouté, ancienne vice-présidente du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar et investie sur la liste de l’opposition, a récemment annoncé son soutien au Pastef. Ce revirement, et d’autres de ce type, suscitent une vive polémique, tant au sein de l’opposition que du Pastef lui-même.
Une opposition en quête de leadership ?
Pour certains observateurs, ces défections témoignent d’une crise profonde au sein de l’opposition sénégalaise, marquée par un manque de leadership et de cohésion. Incapable de conserver ses cadres, elle semble vulnérable face aux avancés du Pastef. Certains membres, comme l’ancien ministre de la Justice Malik Fall, ont publiquement renié leur appartenance à l’ancien régime pour soutenir la politique de Sonko. Cette situation pousse à se demander si l’opposition, déjà affaiblie par le départ de Macky Sall, pourra maintenir sa place sur l’échiquier politique.
La « transhumance » politique, un tabou au sein du Pastef
Pour le Pastef, accueillir ces nouveaux « alliés » n’est pas sans provoquer un certain embarras. Sonko et ses partisans ont longtemps évoqué la pratique de la « transhumance » politique, qualifié de migration opportuniste d’un camp à l’autre. En 2024, Sonko dénonçait ce phénomène, affirmant que son parti restait fermé à toute personne associée à une gestion controversée des affaires publiques. Pourtant, aujourd’hui, le discours s’assouplit, évoquant une collaboration sans conditions avec des soutiens sincères. Une position qui ne convainc pas tous les militants, certains percevant ces rassemblements comme une concession aux principes fondateurs du parti.
Plusieurs personnalités parmi ces nouveaux alliés sont suspectées de chercher une protection contre d’éventuelles poursuites judiciaires. Certains, interdits de sortie du territoire, voient dans leur rapprochement avec le Pastef un enjeu pour éviter d’être confronté aux tribunaux. La quête d’une majorité parlementaire semble ainsi inciter le Pastef à fermer les yeux sur ces reconnus, un choix qui pourrait ternir l’image d’intégrité que le parti s’efforce de projeter.
Le Pastef face à la pression de la reddition des comptes
Le dilemme pour Ousmane Sonko et le président Diomaye est de taille : doivent-ils rester fidèles à leur promesse de justice et de transparence, ou privilégier le renforcement de leur pouvoir législatif ? En accueillant des personnalités controversées, le Pastef prend le risque d’affaiblir sa crédibilité auprès d’un électorat qui a voté pour le changement et l’intégrité. La question de la reddition des comptes demeure donc importante, car beaucoup s’interrogent sur le genre des dossiers judiciaires touchant ces anciens dignitaires, à l’issue des législatives.
Du côté de l’Alliance pour la République (APR), aujourd’hui dans l’opposition, l’heure est à la dénonciation. Dans un communiqué, l’APR accuse le Pastef d’avoir orchestré un plan de déstabilisation en instrumentalisant la justice pour inciter des responsables à rejoindre leurs rangs. Ces accusations, bien que non fondées, alimentent le débat public sur l’éthique et la moralité des pratiques politiques au Sénégal.